A drink, A friend & Discussion

Douglas n’avait repris contact avec moi avant ce jour-là. Je me disais que c’était normal, il avait du boulot, j’avais du boulot également… nous étions très pris et nous avions des emplois du temps chargés, du fait de nos emplois respectifs ! De plus, s’il enquêtait sur la trace de ma fille, alors je n’allais pas le déranger. Je n’espérais rien de tout cela. Je savais qu’il n’arriverait pas à faire des miracles. Mon ex-femme était peut-être meilleure que lui et ses sbires. Je n’en savais rien, et en fait, je préférais ne pas y penser. Je donnerais tout pour revoir Clio… mais je savais que néanmoins, si ça arrivait un jour, ce serait dans très longtemps. Et pourtant…

Pourtant, Douglas me contacta, un jour, pour me donner rendez-vous dans un bar, histoire de boire un verre entre potes. Ce que j’acceptai de bonne grâce. Je n’allais pas refuser, j’en avais bien besoin. Je savais que je n’allais pas finir ivre, parce qu’il ne me laisserait pas faire, mais je pourrais boire un peu pour me sentir un peu plus léger. Sur les coups de dix-neuf heures, j’entrai dans le bar, et je repérai aisément Doug, qui était déjà assis à une table, une pinte de bière en face de lui. Il semblait réfléchir, et apparemment, ça avait l’air très sérieux. Quand il me vit arriver, il m’accueillit avec un grand sourire en me demandant comment j’allais. Je lui serrai la main amicalement avant de m’asseoir.

« Salut mec… tout va bien et toi ? T’as l’air épuisé ! Une grosse affaire ? »

Je m’intéressais assez peu aux autres, normalement, mais lui c’était différent. Je l’aimais bien, c’était ça en fait. Je n’avais pas beaucoup d’amis, mais le peu que j’avais, je les aimais beaucoup et je ne leur faisais pas de coup bas. Réciproquement de leur part je n’en attendais pas non plus. Douglas n’était pas de ce genre là, j’en étais sûr. Mais savais-je vraiment lire dans l’esprit des gens… ?

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Les cernes de Douglas ne me trompaient pas. Il était crevé, et je me demandais bien depuis combien de temps il n'avait pas pris de vacances ! il ne devait pas se tuer à la tâche, sinon il n'arriverait jamais à faire quoi que ce soit pour ses clients. J'en faisais partie après tout. Mais je n'étais pas là pour ça, visiblement.

« Plusieurs en réalité, et une qui m'a particulièrement mis à l'épreuve. Et... »

Je l'écoutais avec attention, prêt à comprendre ce qu'il le mettait dans un état de fatigué pareil. Étrange qu'il se laisse aller à ce point-là, je ne l'imaginais pas ainsi. Enfin... tout le monde a sa part d'ombre et de secrets. Il connaissait les miens, mais je ne connaissais pas encore tout de lui. Ce qui me mettait dans une situation d'infériorité que je n'appréciais pas vraiment. Seulement, il semblait un peu enclin aux confidences à présent, et c'était peut-être grâce à la bière.

« J'ai une cliente qui me plais, enfin une ancienne, et aujourd'hui je n'ai plus beaucoup d'excuse pour la voir. Et je suis un peu rouiller niveau drague... »

Attendez une seconde, quoi ??! Il allait me demander conseil ?! Il était taré. J'étais nul dans tout ce qui était drague. Je n'avais jamais purement dragué. Mon ex-femme, je l'avais connue au lycée, et à l'époque, il n'y avait pas besoin de faire ça. Elle était tombée sous mon charme, et c'était tout. Aujourd'hui, je couchais avec les femmes quand elles étaient bourrées. C'était ainsi que ça s'était passé avec Sarah. Et maintenant, il n'y avait pas de jeu de séduction. Nous couchions ensemble dès que l'un ou l'autre avait envie et c'était tout.

« Attends, je t'arrête tout de suite mon pote. Je suis pas vraiment le genre de type à donner des conseils pour réussir avec les filles... C'est pas trop mon truc ... »

Néanmoins, ce n'était pas pour autant que je ne pouvais pas essayer de l'aider. Il pouvait toujours m'exposer la situation et je pourrais toujours essayer de le conseiller. Toutefois, il ne fallait pas s'attendre à un miracle !

« Mais tu as dit que c'était une cliente ? T'es tombé amoureux d'une nana que tu devais aider... ? »

Au final, on se ressemblait un peu lui et moi. Sauf que moi, j'avais couché avec quelqu'un non pas pour l'aider mais pour profiter d'elle. J'allais bien m'en cacher cependant !

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Je le vis rougir jusqu'aux racines, et ça me fit rire. Je n'avais jamais eu ce problème, je ne savais pas vraiment ce qu'il ressentait et avec Sarah, ça s'était passé d'une toute autre façon, et je ne trouvais pas ça plus mal. Ainsi nous n'avions pas eu besoin de jouer au chat et à la souris, de nous séduire et tout le baratin. C'était peut-être un peu moins romantique, mais qui avait besoin de romantisme de nos jours ?

« Oui... je sais que ce n'est pas pro, mais je n'y peut rien... elle est... enfin elle a du peps, un caractère  énervant et en même temps, ça m'attire... Elle me touche beaucoup cette femme... »

Il n'eut pas le temps de continuer plus rapidement que le serveur était déjà revenu près de nous pour nous apporter nos pintes de bière. Je pris la mienne avec entrain, ravi de pouvoir boire un peu, et je continuai d'écouter Douglas sans rien dire, sans faire de commentaire, pour ne pas le vexer. Néanmoins, je n'en pensais pas moins. Une relation professionnelle n'est pas vraiment faite pour durer.

« Enfin, voilà elle c'est faite harceler par un malade... et j'ai aidé à l'arrestation de ce mec, et depuis je ne sais pas si elle est seulement reconnaissante ou si le baisé qu'elle m'a donnée voulait dire quelque chose, je suis perdu... »

Apparemment, il était vraiment en proie aux grands doutes. Je n'allais pas le railler, je comprenais que ce n'était pas le moment, et que là, il avait besoin d'un véritablement ami, quelqu'un qui pourrait l'aider à faire les bons choix et qui pourrait lui donner les bons conseils. Autrement dit, pas moi. Mais j'étais le seul disponible, si j'étais là, et de fait, je n'avais pas le choix. Je bus une nouvelle longue gorgée de ma bière, et, une fois désaltéré, je tentais de trouver les mots justes, les actions qu'il faudrait faire...

« Elle te plaît ? Tu es sûr que ça pourrait fonctionner avec elle ? »

Il sembla dubitatif quelques secondes mais je ne lui laissai pas le temps d'en placer une. Je voulais qu'il m'écoute.

« Alors fonce, vieux ! Et même si ça foire, on s'en fiche pas mal ! T'es jeune, t'as encore le temps ! »

Je n'étais pas certain que mes conseils étaient franchement les meilleurs, mais au moins, ils étaient prodigués, et maintenant il en faisait ce qu'il voulait. Mais j'avais l'impression de bien me comporter en faisant ça, alors pourquoi pas ?

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Cette fois, c'était plutôt une sorte d'incompréhension que je lisais sur le visage de Douglas. De l'incompréhension, très vite remplacé par un air rêveur et charmé. Je levai les yeux au ciel, ça y est, ce soir-là, je devais le conseiller et la prochaine fois, il faudrait que je tienne la chandelle. C'était hors de question ! Je voulais bien essayer de le conseiller, mais ce n'était pas pour qu'après on se trimballe sa copine partout avec nous.

« Foncer, je veux bien, mais comment ? Je n'ai pas réellement dragué depuis plus de deux ans.... je ne sais plus m'y prendre avec les femmes. Et si ce n'est pas réciproque, je n'ai pas envie de me prendre un râteau monumental. »

Il n'avait qu'à lui dire très clairement qu'il l'appréciait, et ce serait fini. De nos jours, la drague n'était quand même pas le point culminant du romantisme. Les femmes savaient que le prince charmant n'existait pas et n'avait probablement jamais existé et les hommes n'étaient plus assez galants pour prendre le temps d'être romantiques. A moins que Doug soit de la vieille école... mais c'était ridicule, il était plus jeune que moi, pourquoi le serait-il ? A moins qu'il ne soit naïf...

« Mais tu l'as verra... elle a une crinière rousse, et un regard, mais mec, tu ne peux pas résister ! En tout cas je ne peux pas lui résister. Mais ça reste une ancienne cliente... et maintenant je fais quoi pour l'aborder hein ? »

Sans qu'il ne puisse me voir, j'avais déjà failli vomir deux fois. Evidemment que l'on pouvait résister à une femme ! Il fallait juste se remémorer tout ce qu'elle pourrait faire pour t'en foutre plein la tronche et c'était gagné. Bien évidemment, j'étais un peu méchant. Sarah n'était pas de ce genre-là. Mais il ne fallait pas oublier comment nous nous étions rencontrés Sarah et moi : bourrés. Il n'y avait pas trente-six solutions, et c'est ainsi que je répondis à Douglas :

« Ecoute vieux, soit tu lui dis clairement ce que tu attends d'elle, soit tu la fais boire et vous couchez ensemble ! »

Il me regarda d'un air effaré et je compris alors qu'il avait un côté fleur bleue et qu'il aimait bien le romantisme. Bien... alors on n'était pas fait pour s'entendre sur ce point-là lui et moi. Surtout, je voyais que ça le travaillait vraiment, tout ça. Il avait commencé à boire avant moi, je n'étais pas sûr et certain qu'il ait mangé, et il s'enfilait les pintes comme s'il buvait de l'eau...

« T'en es à combien de bières là ? »

Je n'aimais pas faire le bon petit père, mais je devais lui rendre la monnaie de sa pièce. Il m'avait aidé la dernière fois et c'était à mon tour maintenant...

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Douglas semblait complètement pris dans ses pensées, et je n'osais pas le déranger. Je préférais qu'il se pose des questions tout seul. Ce n'était pas forcément moi qui allais vraiment l'aider, malheureusement. J'étais plutôt nul, je ne le dirais jamais assez. Ce qui me faisait flipper, c'était de voir Douglas boire aussi rapidement. C'était des pintes quand même, il ferait mieux de faire gaffe. Il allait terminer bourré, et j'avais plutôt intérêt à faire attention à lui. Je n'avais pas peur d'être ivre, parce que je savais me contrôler et rentrer chez moi... mais lui, je ne le connaissais pas bien, je ne savais pas comment il réagissait à l'alcool. J'allais y aller molo sur la boisson alors, malgré le fait qu'il me dise qu'il allait fini au soda ou aux cocktails sans alcool. Je savais ce que c'était. On disait cela, et ensuite, on buvait quand même.

« Bon tu n'as pas vraiment de conseil pour que j'arrive à faire craquer Amelia pour moi ?! »

Il éclata de rire, et je me retrouvai comme un con, à essayer de lui trouver un véritable moyen de la draguer en bonne et due forme. Je n'en savais rien, moi, en plus je ne la connaissais pas, la fille, comment voulait-il que je l'aide ? Il était déjà bien plein, en fait, et je n'étais pas sûr de le croire quand il disait qu'il n'était qu'à sa deuxième pinte. L'alcool devait lui monter très vite à la tête, à ce petit.

« Bah écoute, je sais pas, dis-lui que tu l'aimes bien quoi. Si elle aime la franchise, c'est dans la poche ! »

J'avais vraiment l'air ridicule,  devant lui, alors qu'il était plié en deux de rire. Je ne comprenais pas pourquoi il était comme ça, mais l'alcool aidait, c'était clair. Et soudainement, il prit un air très sérieux et me regarda en essayant de parler :

« Je dois te dire un truc Thomas, et je préfères le faire pendant que je suis encore un minimum sobre. »

J'attendis qu'il parle, mais il n'en fit rien. Je le regardai en haussant un sourcil, en me demandant s'il allait vomir tout de suite ou dans une heure, et je réfléchis alors à tout ce qu'il pourrait bien vouloir me dire. Rien ne me venait. Alors en attendant, je pris une gorgée de ma bière, et le poussai du coude pour qu'il parle !

« Je t'écoute vieux, qu'est-ce qui t'arrive ? T'es amoureux de moi, c'est ça ?! »

A mon tour d'éclater de rire pour me foutre de sa gueule. Depuis que je lui avais dit que je croyais qu'il était gay, j'étais sûr qu'il avait psychoté.

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Il éclata de rire en me regardant. Le jeune détective était visiblement pompette, et en plus, il me trouvait drôle. Je devais avouer que c'était l'effet recherché également. Que l'on rigole un peu, et qu'il se détende. Mais néanmoins, je faillis recracher ma bière quand il reprit la parole :

« NON ! Mais... il y a un mec qui m'a dragué et qui m'a embrassé. »

J'ouvris de grands yeux. Je ne pensais pas que ça allait vraiment arriver. Quand je disais des trucs comme ça, c'était simplement pour taquiner, pour me moquer gentiment, mais je ne pensais pas que ça allait faire effet à ce point-là. C'était juste une coïncidence ! Dans la foulée, Douglas ajouta que je pouvais me moquer de lui, et qu'il était préparé à tout ce que j'allais pouvoir lui dire. Je le regardai sans rien dire, un peu navré que mes mots aient été en quelques sortes réels.

« Je vais rien dire, mon pote, vraiment. »

Il ne sembla même pas m'entendre. D'une longue gorgée, il termina sa seconde pinte, alors que la mienne était encore aux trois-quarts remplie. Il n'allait pas bien, vraiment pas bien... Il y avait autre chose que les questions qu'il se posait à propos de son ancienne cliente, et le fait qu'il se soit fait embrasser par un homo. C'était clair et net. Et quelque chose me disait que plus profondément, il y avait une chose qu'il ne voulait pas dire, ou qu'il ne savait pas comment dire.

« T'es vraiment bizarre, toi. Qu'est-ce qu'il se passe ?! C'est pas ta copine qui te met dans cet état-là, ni le type qui t'a embrassé, alors avoue tout ! »

Son oeil vitreux se posa sur le mien et son regard me fit froid dans le dos, sans trop savoir pourquoi. C'était bien la première fois que ça m'arrivait...

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Douglas commençait vraiment à m’inquiéter, bien que je savais qu’il ne fallait pas non plus que je m’en fasse de trop. Il avait juste un bon coup dans le nez, ça allait passer. Il semblait chercher ses mots, et je ne savais pas si c’était parce qu’il était un peu ivre qu’il galérait comme ça, ou bien si c’était parce qu’il ne savait vraiment pas quoi dire. Ça devait être important, c’est pour cette raison que je décidais de le laisser tranquille, de ne pas le charrier. Il fallait qu’il prenne son temps, c’était important. Et pourtant… j’allais regretter de l’avoir laissé parler…

« Je suis désolé, je te connaissais avant de te ramener chez toi, quand tu étais bouré. J'ai été engager pour savoir ce que tu cachais. Quand je t'ai vue dans la boite, je me suis dis, que je ne pouvais pas te laisser là bas dans l'état que tu étais. J'ai pris la décision de te ramener, et après quand on a parler, j'ai découvert un homme différent que l'on m'avait décrit.  »

La première chose qui me vint à l’esprit, ce fut de me demander qui aurait bien pu faire des recherches sur moi. Plein de gens évidemment. Plus ou moins proches. Peut-être que c’était même David, ça ne m’étonnerait pas. Peut-être qu’il croyait que je lui avais menti quand je lui avais raconté mon histoire… c’était peu probable, mais peut-être voulait-il une confirmation ? Pourquoi prendrait-il la peine de faire cela ? Néanmoins, j’attendis que Douglas termine pour poser mes questions. De toutes façons, j’étais pratiquement sûr qu’il n’allait pas répondre. Secret professionnel… je connaissais cela mieux que quiconque. Si un journaliste ne dévoilait jamais ses sources, un détective privé ne pouvait pas non plus donner le nom de ses clients. J’étais fait comme un rat, il aurait obligation de dire ce qu’il avait trouvé à la personne qui lui avait demandé.

« Je me suis dit alors que je ne dirai rien sur l'homme que je venais de rencontrer... mais je ne pouvais plus garder pour moi ce que je te cachais. Tu as été honnête et je devais l'être avec toi. Je comprendrais si... si tu ne veux plus me voir. »

Cette fois, je me refermai sur moi-même, en ne comprenant pas vraiment où il voulait en venir. Il venait clairement de me dire que, malgré les révélations que je lui avais faites, qui seraient bénéfiques pour son enquête et qu’il devrait dire à son client, il ne les raconterait pas… ? Je ne comprenais pas. Son client le payait pour qu’il trouve des informations sur moi, pour pouvoir me faire chanter par la suite, sans aucun doute. Alors pourquoi Douglas prendrait-il la peine de ne pas raconter tout ce qu’il savait ? Il fallait qu’il le fasse, il l’avait en quelques sortes promis, non ? Mais j’étais encore sous le choc du fait qu’il avait cherché des informations sur moi. Et qu’il les avait eues sans même faire d’efforts, en réalité.

« Tu as fait… des recherches sur moi, alors ? »

Pas besoin qu’il me réponde, un seul coup d’œil suffisait. J’essayais de me détendre un peu, mais mon cerveau fonctionnait à plein régime pour savoir qui pourrait demander une chose pareille. Un collègue de travail ? Un inconnu sur qui j’aurais écrit ? Polloni qui reviendrait se venger ? Non, impossible. Elle ne pouvait pas savoir que c’était moi. Sauf si David lui avait dit !

« Qui t’a demandé de faire ça ? »

Quitte à me prendre un vent, autant tenter le tout pour le tout, non ? Il fallait bien que j’essaye, si jamais Doug était déjà assez bourré pour ne plus savoir qu’il y avait un secret professionnel…

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Comme si je croyais que Douglas allait répondre à ma question, j’attendis la réponse avec une impatience presque étrange. Mais il s’agissait de moi, là, et je voulais savoir qui enquêtait sur moi. Et ce que Doug ne savait peut-être pas, c’était que je ne lâchais rien, pas tant que je n’avais pas tout obtenu. Et je m’en foutais du secret professionnel. Moi aussi, j’en avais un, et je ne le respectais pas tout le temps. Je croyais que j’étais son pote, alors c’était quoi le problème ? Il pouvait bien faire une entorse à la règle. Je lui avais tout raconté de moi, et j’estimais être en droit de savoir qui en avait après moi !

« Je... je ne peux pas.... je n'ai pas le droit de te le dire, elle ne serai pas contente.... »

Elle ? Alors c’était une femme ! Mais ça pouvait être n’importe qui. De mon ex-femme à Abigail Polloni, ou bien une femme avec qui j’aurais couché, mais qui aurait voulu et que j’avais platement repoussée. C’était bien étrange cette histoire. Et surtout, à part Abigail Polloni, éventuellement, je ne voyais qui pourrait vouloir apprendre des choses sur moi. C’était ridicule. J’étais un citoyen lambda de Toronto. Et je n’avais rien fait de bien particulier dans ma vie, je n’avais jamais rien caché d’important. Du moins, pas que je m’en souvienne.

« Tu as dit « elle » ? Qui est-ce ? Dis-moi Doug ! »

A force de persuasion, j’étais pratiquement sûr que je pourrais lui faire cracher le morceau. Je pouvais le faire boire encore plus, ce serait plus pratique. Néanmoins, je restais un peu perdu. Pourquoi diable voudrait-on enquêter sur moi ? Et si notre rencontre, à Doug et moi, n’était en réalité pas fortuite du tout, malgré ce qu’il disait ? Et s’il avait fait exprès, en me suivant ?

« Tom.... je ne peux rien dire de plus, j'en ai déjà trop dit. Mais je voulais être honnête avec toi. »

Être honnête, c’est bien mignon, mais devais-je le croire sur parole ? Il avait quand même fouillé mon passé, et quand je lui avais tout raconté, de bon gré, il n’avait eu qu’à tout apprendre par cœur pour le ressortir à sa cliente. J’avais peur de ce que cette personne pourrait me faire par la suite, si Doug lui avait dit plus de choses qu’il ne fallait. J’avais toutefois l’impression que Douglas était sincère lorsqu’il disait qu’il n’avait rien dit de qui j’étais vraiment… une chance !

« Alors… tu n’as vraiment rien dit sur moi ? De ce que je t’ai raconté chez moi ? A propos de mon ex-femme, de ma fille… et tout ça ? »

C’était mon inquiétude première. Je ne le cachais pas, mais si quelqu’un me voulait du mal, je ne souhaitais pas que l’on s’en prenne à ma famille, à ma chair et mon sang. Mon ex-femme, je n’en avais rien à faire, mais Clio… c’était une autre paire de manches. Si jamais on touchait à un seul cheveu de ma fille, je ferais un meurtre. Je n’hésiterais pas !

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Douglas était ivre, c’était définitif. Mais au moins, je sentais que je pouvais lui faire confiance. Un homme ivre dit toujours la vérité, parce qu’il ne sait et ne peut pas mentir. Je le savais, j’étais le premier à raconter toutes les vérités à mon propos quand j’étais bourré. Il me fallait une grande volonté pour pouvoir me contrôler, mais parfois, c’était tout bonnement impossible ! Dans un sens, j’avais envie de le faire boire encore plus pour qu’il me dise finalement qui était cette bonne femme qui demandait des informations sur moi, mais Douglas était un pote, et je ne pouvais pas faire ça à un pote, c’était l’honneur qui était en jeu, là !

« Non, je n'ai rien dit, je ne trouvais pas sa correcte, entre ce qu'on ma dit de toi et l'homme que j'ai rencontrer, c'était complètement différent. Je ne sais pas pourquoi tu mens, pourquoi tu as agis comme ça, tu dois avoir tes raisons. Moi même je ment parfois pour mes enquêtes. Mais tu n'as pas été comme ça avec moi... Je ne pouvais pas te trahir. »

Pourquoi je mentais ? Parce que j’étais journaliste, et qu’un journaliste est toujours mal vu, dans n’importe quelle situation. Personne n’aimait les journalistes. Les journalistes étaient des putains de fouineurs, des chieurs qui cherchaient la petite bête et qui aimaient emmerder les gens. Je le savais, et je l’assumais pleinement. Mieux encore, je jouais mon rôle à la perfection, que ce soit de plein gré ou non, à cause de Billy. C’était sûrement Polloni qui voulait savoir qui l’avait suivie partout pour avoir un scoop. Ça ne me dérangeait pas qu’elle fasse appel à un détective, du moment que Douglas ne lui dise rien de trop personnel. Mais s’il voulait lui dire que j’étais bel et bien journaliste ou des trucs comme ça, alors ce serait sans problème !

« C’est vraiment… sympa ! Merci Douglas, je vois qu’on peut compter sur toi ! »

Je lui tapai doucement dans le dos pour le remercier et terminai ma bière d’une traite. Cette fois, c’était peut-être moi qui avait besoin de boire, pour faire passer le choc…

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Douglas ne semblait pas vraiment croire à ce qu'il entendait. Pourquoi se méfiait-il de moi ? Ah oui, parce qu'il avait fait des recherches et qu'il avait dû comprendre que j'étais un homme menteur et manipulateur, que j'étais le pire des bougres que cette Terre ait pu porter. Evidemment.. Je me demandais vraiment qui avait pu faire appel à ses services. C'était flippant, en y pensant, parce que je ne pensais pas qu'un jour, on ferait des recherches sur moi... Mais bon, ce n'était pas grand-chose... et je n'avais pas peur de ce qu'on pourrait me faire. Encore une fois, quand il s'agissait de moi, ce n'était pas grave, mais il ne fallait pas qu'on touche à ma fille. Sinon, je deviendrai fou !

« Ouais, mais bon.... rien est très pro dans tout ça, mais je ne me vois pas te mentir plus longtemps... Et tout ce que tu m'as dit, je le garderai pour moi, parce que... que je te considère comme un ami, tu m'as fait confiance quand tu m'as avouer ton passé... »

Je me forçai un peu à sourire. Je n'appréciais pas qu'il ait cherché des choses sur moi, mais à ce moment-là, il ne me connaissait pas encore comme on se connaissait aujourd'hui, si ? Alors je ne pouvais pas lui en vouloir ! Je notai néanmoins qu'il me considérait comme un ami, et j'étais content de voir que je pouvais encore me sociabiliser.
Soudain, je me dis que j'allais faire quelque chose de dégueulasse, mais que je n'avais pas le choix. Après un signe au serveur, je commandai deux verres d'alcool fort. Moi j'en avais l'habitude, par rapport à Doug. Et je voulais savoir qui lui avait demandé ce service. Quand les verres arrivèrent, je bus le mien cul-sec, et invitai Douglas à faire de même. Et au bout d'un quart d'heure à continuer ce manège, nous étions tous les deux bien soûls. Lui plus que moi d'ailleurs !

« Tu sais Doug... je me demande vraiment qui voudrait savoir qui je suis... je veux dire.. je suis journaliste... il faut que je cache mes sources, non ? »

Je commençai mon attaque, en surjouant un peu mon alcoolisme du soir.

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Il fallait que Douglas parle. Il le fallait ! J'allais payer toutes nos consommations, mais il me le dirait ! Et j'allais le faire boire jusqu'à ce qu'il ne se souvienne même plus de son prénom. Je devrais avoir honte de faire ça... mais j'avais envie de le savoir. J'étais son pote, j'avais le droit de savoir, non ? Et puis, si c'était quelqu'un qui n'était pas très important pour moi, je m'en ficherais, non ? Mais ma curiosité était piquée à vif, et je ne pouvais pas louper cette occasion de l'assouvir. Douglas paraissait un peu paumé, un peu ivre - même complètement - et je sentais que j'aurais plus d'infos mais qu'il ne fallait tout de même pas que j'abuse de sa confiance.

« Une blonde.... très belle... très sexy... mais j'ai déjà donnée dans les clientes, maintenant je suis plutôt rousse... oui Amelia.... »

Une femme blonde ?! Plus de doutes alors, ça devait être Polloni. Je n'hésitais même plus, c'était forcément elle, de toutes façons. Elle seule pourrait se payer un détective privé. Elle avait dû obtenir mon nom et ma photo quelque part, sûrement à la rédaction, en payant grassement quelqu'un... Il faudrait que je mène mon enquête. J'enchaînais avec une autre question, cette fois plus générique.

« Et tu as fini avec cette enquête sur moi ? »

Et s'il ne voulait pas répondre, alors tant pis pour moi...

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Après une seconde d'hésitation, Douglas reprit la parole, pour me dire que la gonzesse qui me suivait n'était pas totalement satisfaite. Il m'indiqua alors qu'elle partageait ma vie et qu'elle ne voulait pas se faire avoir. Merde ! C'était Sarah ?! C'était impossible ! J'aurais vraiment pensé que ça aurait été Polloni, mais là, il m'en bouchait un coin. Sarah... Enfin, j'aurais dû m'en douter. Je lui mentais depuis le début, et elle avait dû le comprendre. Elle voudrait sûrement des explications ou bien même rompre. Ça ne me dérangerait pas... j'aurais fait la même chose !

Alors que j'étais dans mes pensées, j'entendis Douglas rire comme un perdu et je le fixai sans comprendre, mais il était tellement saoul qu'il ne parvint pas à m'expliquer. Il but un nouveau verre sans réfléchir et je lui tins fortement le poignet pour qu'il me regarde et redevienne sérieux.

« Tu es en train de me dire que ma copine ta paye pour enquêter sur moi, c'est ça ?! Ma propre copine ??! Putain, Douglas, je t'interdis de lui dire quoi que ce soit de plus, compris ?! »

Je relâchai son poignet, qu'il se massa immédiatement, et j'anticipai l'arrivée du serveur, en le renvoyant de là où il venait, sans prendre les verres qu'il amenait !