Une énième fois, il était tard lorsque je passai le pas de la porte de la maison. La journée avait été longue, et je n’avais qu’une seule envie : me coucher et dormir jusqu’à plus sommeil. Les audiences s’étaient enchaînées sans interruption, j’avais couru d’une pièce à une autre toute la journée, entre mon cabinet et le palais… c’était éreintant, mais stimulant. Sauf que lorsque la journée prenait fin, la fatigue s’amoncelait et se faisait ressentir.

Ce ne fut qu’en enlevant ma veste et en sentant une bonne odeur de nourriture que je sus que j’avais fait une connerie. Je regardais rapidement la date sur le calendrier mural de l’entrée, et checkais l’heure à ma montre. J’étais en retard et plus qu’en retard même, pour le dîner que Sasha voulait que l’on se fasse entre père et fille. J’avais me faire démolir, et je l’aurais bien cherché, cette fois. Elle et son sale caractère n’allaient pas me louper. J’entrai à pas de loups dans la salle à manger, en essayant de ne pas me faire trop remarquer, mais ma petite tête blonde m’avait entendu dès que j’étais entré et me fixait avec colère. « Sasha… excuse moi, chérie… » Je n’avais même plus vraiment la force de me battre et de lui expliquer ce que j’avais fait de ma journée. De toute façon, ça ne changerait rien à sa colère et au fait qu’elle m’avait attendu alors que j’avais promis. « … Je suis désolé, d’accord.. ? » J’étais très sincère, il ne tenait qu’à elle de me croire, mais je savais que j’avais encore tout foiré. « On va quand même le faire ce dîner, d’accord ? Je vais faire réchauffer tout ça, et ensuite on regardera un film, ok ? » Je voulais me rattraper. Je n’avais vraiment pas été un père très présent pour elle, et ce depuis des années. Elle avait dix-huit ans, il était trop tard pour que je me rattrape, mais je ne voulais pas que l’on gâche tout ce que nous avions…

Sasha soupir devant les complaintes de son père. A quoi bon être énervé, elle sait qu'elle passe et passera toujours après le travail de son père. Et même si elle le sait.... Il est toujours très difficile de l'accepter.

- Réchauffer.... mouis, mais ça va être trop cuit.... mais ça sera toujours mieux que rien.

Sasha se lève et part dans la cuisine pour réchauffer les plats. Elle soupir puis se demande comment tourner les choses. Elle devait amener les choses en délicatesse. Et surtout, elle devait mettre son père dans la poche et donc, être une gentille petite fille modèle. Prendre son père dans le sens du poils, voilà son plan.

Après quelques minutes, elle arrive dans le salon avec les plats dans les mains. Un peu de vin, aiderai à aborder les sujets primordiaux, comme son départ de la maison et son voyage. Mais il est hors de question qu'elle boivent de l'alcool devant son père.

- Tu as choisis quoi comme film papa ?

Bien entendu, je savais que Sasha m’en voudrait pour le reste de la soirée. Evidemment qu’elle allait me regarder d’une façon mauvaise, qu’elle allait faire des remarques. Parfois je me demandais même si elle ne me détestait pas. Elle aurait presque raison de le faire. J’avais été un père détestable, désagréable, et vraiment inhumain, certains jours. Pendant qu’elle avait besoin de moi, je passais mon temps au boulot, à gérer des affaires qui me permettaient de garder la tête hors de l’eau alors que j’avais une enfant qui avait besoin de moi pour garder sa tête hors de l’eau.

Sasha était partie réchauffer les plats préparés qu’elle avait commandés, et pendant ce temps-là, je cherchais ce que nous pourrions regarder. Je pris la télécommande pour allumer la télévision et brancher Netflix, puis je recherchai dans le catalogue de films ce que nous pourrions regarder ensemble. Quelque chose qui lui plaise, mais qui me plaise à moi aussi. Nous n’avions pas forcément les mêmes goûts, bien entendu c’était normal, mais il fallait impérativement que je trouve quelque chose qui nous irait à tous les deux. Elle revint en me demandant ce que j’avais choisi et je tournai la tête vers elle : « Je regarde ce qu’il y a sur Netflix, c’est affreux ce truc parce qu’il y a trop de choix, on y passe un temps fou… » Je lui fis un petit sourire et lui fis signe de venir choisir avec moi. A deux, ce serait plus simple.

Une fois le film choisi, je m’installai dans le canapé en enlevant ma cravate et en remontant les manches de ma chemise. La musique du début démarrait et je pris le temps de servir les plats dans les assiettes qu’elle avait apportées, et lui tendis la sienne. « Bon appétit, ma chérie… Merci pour tout. » Je savais qu’elle avait mis du coeur à l’ouvrage pour préparer cette soirée, et j’étais reconnaissant envers elle. J’avais merdé en ne rentrant pas à l’heure prévue, mais je comptais bien me rattraper.

Sasha s'installe sur le canapé près de son paternel. Même si elle fait sa tête de cochon, les moments en compagnie de son père, son ses meilleurs instants. Alors, elle va pas faire la tête longtemps, elle va devoir mettre son père dans de bonne disposition pour lui dire ce qu'elle avait à lui dire. Ils optent pour une comédie, au moins ça passe pour tous les deux. La jeune fille sourit à son père, même si il était très pincé son sourire.

- Pas de quoi.... papa.....

Sasha doit s'armer de courage, oh d'habitude elle en a assez pour tenir tête à n'importe qui, mais pour face à son père, elle a toujours 5 ans. Elle prend une fourchette de nourriture puis fixe son père.

- Papa.... Je.... j'ai trouvé un appartement, j'ai assez pour me le louer et je travaille dur pour pouvoir le garder, papa, je quitte la maison la semaine prochaine.

Et voilà, c'était dit, elle avait réussit une bonne chose de dite, il en restait encore une. Pour le moment, elle attend la réaction de son père, étant avocat, il va bien lui trouver une tonne d'argument pour ne pas qu'elle parte du foyer.

La soirée était sauvée. Nous avions lancé une comédie sur la télévision, les plats étaient réchauffés et sentaient divinement bon, et nous étions tous les deux assis l’un à côté de l’autre sur le canapé, à déballer la nourriture afin de pouvoir nous sustenter. La soirée allait être agréable, au moins, cela changerait du boulot. J’espérais que Sasha ne m’en voulait pas trop pour mon retard. Elle était habituée à cela, malheureusement, et parfois, je ne pouvais vraiment pas faire autrement.

Le film avait à peine commencé et j’étais en train d’engloutir une grosse bouchée de nouilles quand Sasha prit la parole. Du coin de l’œil, je la voyais me regarder fixement, et ce que j’entendis ensuite me figea. Je reposai le plat sur la table basse et me tournai vers elle en m’essuyant la bouche avec une serviette en papier. « … J’aurais bien sûr aimé que l’on en parle ensemble avant… soupirai-je. » Je savais qu’un jour, cette chose arriverait. Je savais que ma fille, la seule personne qui me restait, allait vouloir partir de la maison. C’était évident, c’était ce que faisaient les enfants. Elle avait dix-huit ans, et il était temps qu’elle fasse sa vie. Je ne pouvais pas la retenir ici. « Il te coûtera combien cet appartement ? Tu sais que si tu as besoin d’argent, tu peux me demander, d’accord ? » Elle allait râler, je le savais, mais il fallait qu’elle soit sûre que je la soutiendrais, dans tous les aspects possibles. « Tu me feras visiter ? ajoutai-je avec un petit sourire. » Par cette demande, je lui faisais ainsi comprendre que tout était accepté de mon côté, et que je l’aiderais volontiers à déménager ses affaires…

La réaction de son père la surprend, même si il est un peu froissé de ne pas avoir été prévenu avant, il accepte sans discuter que Sasha parte du foyer. En même temps, elle avait préparé un argumentaire pour que son père ne puisse pas la contre dire. Cependant, Sasha n'a pas eu le temps de lui énoncer les moindres points qu'elle avait pu répéter.
La jeune blonde sourit, la proposition de son père à l'aider financièrement, lui fait plaisir, même si la fierté de la jeune femme ne lui demandera jamais.

- Bien sûr que je te ferrais visité. Ce n'est pas bien grand, mais j'ai ma chambre, et assez de place pour avoir ma table à dessin. Et le quartier est pas mal.

Bon, Sasha était au troisième étage sans ascenseur, la cuisine était dans la pièce à vivre, mais cette dernière était assez grande pour danser si elle le voulait. Elle avait hâte d'y être..... et inviter aussi Fergus. Elle sourit en pensant à lui. Leur voyage se fera bientôt, et ça aussi, Sasha devait en parler à son père.

J’imaginais évidemment que cela faisait beaucoup plaisir à Sasha que je sois aussi sympathique avec elle. Elle n’aurait probablement jamais imaginé que je sois si conciliant avec le fait qu’elle voulait partir de cette maison et voler de ses propres ailes, mais c’était ce que tous les enfants étaient sensés faire, une fois leur majorité atteinte. C’était encore mon petit bébé, certes, mais ce serait toujours le cas, et je devais la laisser grandir. Ainsi, pour la laisser grandir, je devais la laisser partir. Faire sa vie. Et si je paraissais très calme en surface, j’étais malheureusement bouillonnant de stress à l’intérieur. « Je veux quand même pouvoir te donner mon avis sur l’appartement, même si je suis sûr que tu t’es débrouillée comme une chef, et qu’il est parfait ! » C’était mine de rien assez important pour moi : je ne voulais pas que ma petite fille chérie soit dans un logement insalubre, mais qu’elle trouverait génial juste pour un détail, ou sa proximité avec les quartiers de jeunes étudiants. « Je suis fier de toi, chérie.. dis-je en la regardant avec un sourire. Je te l’ai pas assez dit, je le sais bien. » Ce n’était pas le moment de faire le père larmoyant, parce qu’elle sentirait venir une arnaque qui n’existait pas, et elle me crierait encore dessus de ne pas être comme ça et de ne pas chercher à l’apitoyer. Mais malgré tout, je pensais ce que je venais de dire. Je n’avais pas été le père parfait que j’aurais pu être, si la situation avait été différente…

La jeune fille essaie de cacher son sourire face aux paroles de son père. Il l'a élevé ainsi, à être forte et rapidement indépendante. Même si au fond d'elle, Sasha ne voulait pas grandir si vite, si tôt. Les joues de la blonde rougissent un peu quand son père lui dit des mots qu'elle a si peu entendu depuis sa naissance. Il était fière ? Vraiment ?! Alors qu'elle doute de savoir ce qu'elle fait vraiment, ce qu'elle aime faire, et ce qu'elle veut faire dans sa vie. Mais pour l'instant, elle préfère ne pas trop se poser des questions.
L'assiette vide posé sur la table basse, Sasha s'installe dans le fond du canapé, et après de longue minutes, elle se rapproche de son père et pose sa tête sur son épaule.

- La vie nous a pas gâté.... mais on s'en sort pas si mal je trouve....

Certes, leur vie aurai pu être bien plus douce, bien plus belle, mais ma vie en avait décidé autrement.

Peut-être qu’une fois Sasha adulte, nos relations redeviendraient des relations père/fille normales. Peut-être que le fait qu’elle ne soit plus à la maison allait nous rapprocher, d’une façon complètement étrange et illogique. Mais elle avait besoin de son indépendance, et de ne plus devoir compter sur moi. Je virevoltais au gré de mes affaires, et je n’étais jamais à la maison. Elle était habituée à vivre seule, et peut-être qu’ainsi, chacun de notre côté, nous réussirions à nous entendre sans problème. Le temps nous le dirait. J’avais déjà quelques petites preuves pour affirmer ma pensée : Sasha était désormais collée à moi, la tête sur mon épaule, et cela faisait bien longtemps que nous n’avions pas partagé un moment ainsi, elle et moi. « Tu as raison, on s’en sort bien… » J’étais très nostalgique de l’époque où elle était petite, qu’elle faisait la misère à son petit frère, que l’on passait des soirées entières tous les quatre sous un plaid, à regarder un film niais à souhait. Ce temps était bien sûr révolu, et je m’étais fait une raison, nous ne pourrions jamais revenir en arrière, mais ça me manquait terriblement. « Ta mère et ton frère me manquent… » Ce constat me fit frissonner, parce qu’à cause de leur manque, je me rendais compte que j’avais délaissé la fille qui me restait, ma fille, mon petit bébé. Un bon père aurait relevé la tête coûte que coûte, mais il fallait bien que je me rende à l’évidence : c’était Penny qui était la plus forte de nous deux. « Je serai toujours là pour toi ma chérie, quoi qu’il arrive, tu le sais hein ? » Même si bien sûr, il arriverait un jour où elle n’aurait plus du tout besoin de moi, je voulais toujours qu’elle se sente la bienvenue, et pas une inconnue entre mes murs.

Sasha profite de se moment de calme avec son père pour profiter. Elle n'a pas souvent été ainsi avec lui. Ils se cherche le plus souvent, mais au fond, Sasha aime son père plus que tout au monde. La jeune femme ferme les yeux quand son père évoque son petit frère et sa mère. A elle aussi, ils lui manque énormément, chaque jour un peu plus, même si elle doit regarder des photos d'eux pour ne pas les oublier.

- Moi aussi papa...

Sasha ouvre les yeux, d'un revers de la main, elle enlève la larmes qui coulent le long de ses joues. La petite blonde, fait sa forte la plus part du temps, mais aujourd'hui, contre son père, elle se sentait comme une enfant de 4 ans.

- Je sais papa.... je l'ai toujours su.

La blonde n'est pas stupide, elle sait qu'elle a toujours pu compter sur lui, même si parfois la priorité de son paternel était plutôt le boulot et non elle. Au début, elle ne le comprenait, mais plus elle vieillissait et plus elle savait que c'était juste difficile pour lui d'être à la maison.
Sasha prend une grande inspiration, et se lance, pensant que c'est le bon moment pour annoncer à son père son projet de vacances.

- Papa.... je vais partir cette été, en Colombie Britannique avec des amis.

Il fallait que je lutte, ardemment, contre les larmes qui m’assaillaient. Repenser à cette famille que l’on avait eue, et qui avait été lâchement détruite, c’était parfois trop pour moi. Je faisais le fort, je jouais les gros durs, et heureusement que mon métier était prenant, et passionnant, sinon je savais bien que ça faisait longtemps que j’aurais passé l’arme à gauche. Alors même que ma fille était à quelques mètres de moi, toujours. Sasha pleurait dans mes bras, tout contre moi, et je faisais semblant de ne pas l’avoir remarqué, pour ne pas qu’elle ait honte. Mais honte de quoi ? Etait-ce dégoûtant à ce point de pleurer sa mère, et son frère ? C’était à cause de ma mentalité et de mon comportement merdiques que nous étions dans cette impasse. Au moins, j’étais rassuré sur le fait que l’on s’aimait encore comme avant, ma fille et moi. Ces derniers temps, j’en avais parfois douté. Pourtant, ce qu’elle m’annonça me fit l’effet d’une bombe. Comme si, tout à coup, les certitudes que j’étais en train de retrouver se brisaient, sans crier gare. « En Colombie Britannique ? » Il fallait que j’aie l’air détaché, faire comme si je l’acceptais sans problème, pour l’adulte qu’elle devenait, mais mon coeur se serrait à chaque seconde. Elle voulait partir ? Loin de moi ? Je savais que je l’avais perdue, j’aurais dû être plus présent. Tu n’es qu’une merde, Aaron ! « C’est… des amis que je connais ? » Quel idiot ! Comme si je connaissais ses amis… ! Je ne les voyais jamais. Et s’il y avait un garçon ? Et si elle était tombée amoureuse, et qu’elle ne revenait plus jamais ? J’étais terrifié à l’idée qu’elle me laisse tout seul, qu’elle m’abandonne comme je l’avais abandonnée… « Tu partirais combien de temps ? » J’étais inquiet, je voulais avoir des informations, mais je n’étais même pas sûr qu’elle me les fournisse. Elle aurait tort de me faire confiance, après tout…

Elle se redresse, puis regarde son père. Ses yeux étaient encore un peu humide, mais elle sourit quand son père répète presque tous ses mots. Ca la fait sourire, son moment de tristesse s'envole assez rapidement donc. Mais son moment câlin avec son père, ça ne la quittera jamais.

- Papa, je suis majeur, et j'y ai bien réfléchit. Tout ira bien, il ne m'arrivera rien.

Elle se demande si c'est le bon moment de lui parler de Fergus, Sasha sait d'avance qu'il ne sera pas très heureux et très protecteur. Surtout après le dernier petit ami qu'elle lui avait présenté. Roy n'était pas des plus glorieux, elle le sait.

- Je serai avec Fergus, mon copain et son meilleur pote.

La blonde sait que son petit ami sera un bouclier pour tout ce qui pourrait arriver.

- Je pourrais t'appeler tous les jours si tu veux.

Mais Sasha sait pertinemment que son père va vouloir le voir avant le départ, pour s'assurer que sa petite fille soit entre de bonnes mains.

En réalité, j’avais l’impression d’avoir loupé tout un pan de la vie de ma fille. Depuis quand était-elle aussi grande, aussi adulte ? A part l’engueuler pour chaque connerie qu’elle avait pu faire, je n’avais pas prêté attention au fait qu’elle grandissait. Et voilà qu’elle allait passer ses vacances à l’autre bout du pays et qu’elle partait loin de moi. Je me frappai mentalement la tête. J’aurais dû passer du temps avec elle. Bientôt, elle quitterait la maison, puisqu’elle s’était trouvé un appartement, et je n’aurais plus ma fille chérie près de moi. Mais étais-je encore son père adoré ? Je n’avais pas été des plus présents, durant toutes ces années. « Je sais qu’il ne t’arrivera rien, mais… » Je m’interrompis, pas certain d’avoir bien entendu ce qu’elle avait affirmé par la suite. Son quoi ? … Copain ? « Attends, mais tu ne m’avais pas dit que tu avais un copain ! » Je m’écartai d’elle pour la regarder, les yeux écarquillés. Elle comptait m’en parler avant de partir, quand même ? Bon, d’accord, c’était ce qu’elle faisait à l’instant T, mais j’aurais pu attendre encore longtemps quoi. « Fergus, donc. Enchanté de faire sa connaissance… » Je me renfrognai un peu, même si je devais être heureux pour elle. Si elle partait en vacances avec lui, c’était que tout se passait bien, a priori. J’espérais juste qu’il soit assez adulte pour ne pas l’embrouiller et profiter d’elle. Cependant, en voyant son regard s’assombrir, je me rattrapai rapidement. « Pas besoin de m’appeler, va… Tu n’auras qu’à m’envoyer une photo par jour ! Je veux voir des paysages ! » Je lui fis un petit sourire timide, conscient qu’il allait falloir que je lui laisse de l’espace, qu’elle aurait à faire ses propres erreurs pour avancer dans la vie, et qu’elle devait expérimenter tout ce que son jeune âge pouvait lui proposer. Et je n’avais pas de leçon à lui donner, vraiment pas.

Sasha voit bien que son père n'est pas très à l'aise avec le fait qu'elle est un petit ami. En même temps, il avait de quoi, parce que la jeune femme n'avait pas eu des meilleurs relations la dernière fois.
La demoiselle sourit à son père, ses mots qu'il ne trouve pas, sa gêne qu'il cache c'était la preuve que Sasha voyait de l'amour de son père.

- Avant le départ, tu pourrais rencontrer Fergus, si tu veux, mais c'est gentil. Son père est prof à l'université, sa mère est adorable et il a une petite soeur. J'ai été faire du baby-sitting le mois passé.

Elle essai tant mieux que mal d'être rassurante pour qu'il soit zen quand elle partira.

Mon orgueil de père était piqué au vif, entre la fierté que je ressentais que ma fille toute jolie comme elle était ait un copain, et le fait qu’elle ait justement un homme dans sa vie. Je ne savais pas vraiment qu’en penser, mais si elle était heureuse, alors c’était l’unique chose qui me préoccupait. J’espérais juste qu’elle n’était pas trop aveuglée par l’amour adolescente qu’ils vivaient tous deux. Mais Sasha était intelligente, elle ne se faisait pas berner aussi facilement. « Je te crois, ris-je en levant les mains devant moi comme pour me délier de toute culpabilité. » En effet, je la croyais. Ses parents avaient, oui, l’air de gens bien, et si elle avait déjà fait la connaissance de toute la famille, c’était plutôt rassurant. Elle devait tenir à ce garçon, aussi, je devais me montrer compréhensif et agréable. J’avais bien compris, par le passé, qu’elle m’en voulait de ne pas m’être intéressé à maintes et maintes qui pouvaient la passionner. Maintenant qu’il s’agissait de son petit ami, je devais être exemplaire. « Je veux bien le rencontrer, s’il est d’accord. Pas pour vous fliquer, hein… mais par curiosité, et parce que s’il est amené à devenir mon beau-fils, je veux le connaître le plus rapidement possible ! » Le sourire de Sasha s’agrandit, je sus que j’avais touché en plein coeur de la cible. J’étais content. Nous avions enfin un semblant de relation père-fille.

Sasha sourit, heureuse mais surtout très soulagé, que son père ne lui prenne pas plus la tête pour tout ça.

- Papa, va pas non plus trop vite comme ça. Après c'est vraie que je l'aime beaucoup, mais ça ne fait que quelques mois, que nous sommes ensemble.

Même si pour la jeune femme, c'était déjà bien, et assez fort pour qu'elle ai envie d'aller bien plus loin avec Fergus.

- Papa, tu ne m'a jamais dit si tu avais voyagé quand t'étais jeune.

Faut bien l'avouer elle ne savait pas grand chose de son père, alors qu'elle en savait bien plus sur sa mère, malgré le fait qu'elle ne l'ai pas connu bien longtemps. Aujourd'hui, dans l'état d'esprit qu'elle était, la jeune blonde voulait faire traîner ce moment, elle ne sait pas quand aura lieu le prochain.

Bon d’accord, je faisais un peu de zèle, en imaginant Sasha terminer sa vie avec ce garçon, mais on ne savait jamais comment les choses pouvaient tourner après tout. Quand j’avais rencontré Penny, j’étais un peu plus âgé que Sasha, mais j’avais su tout de suite que c’était la femme de ma vie. Toute cette histoire s’était mal finie, hélas, mais je n’avais jamais aimé une autre femme qu’elle. C’était une autre époque… « D’accord, chérie.. Je te laisse aller à ton rythme.. mais je serais très heureux de le rencontrer. » Je pesais mes mots. C’était important, et pas seulement pour que je sache avec qui elle partait en vacances aussi loin. Je voulais juste m’intéresser à sa vie, ses relations… tout ce que je n’avais pas fait depuis des mois, des années…

« Si j’ai voyagé ? » Je la regardai en fronçant les sourcils, en essayant de me souvenir de mes jeunes années, lorsque j’avais son âge, ou quand j’étais un peu plus vieux. Je n’avais pas vraiment eu l’occasion de bouger. Déjà, quand j’avais son âge, on voyageait moins, on n’avait pas ce besoin enivrant de quitter son pays et d’aller visiter d’autres choses. Ce n’était pas donné à tout le monde, et si Sasha avait eu une enfance dorée à obtenir tout ce qu’elle voulait parce que j’avais de l’argent, mes parents n’étaient pas avocats et je n’avais pas eu la même chance. « Pas vraiment… Enfin, j’ai déjà été à Vancouver, à Montréal.. c’est tout. Parfois à Détroit… Pour le travail quoi. » Je ne me souvenais pas d’avoir un jour quitté le Canada, à part pour aller à Détroit, mais ce n’était vraiment pas loin de la frontière……. en fait, si. Il y avait eu un voyage… « Si… J’ai voyagé une fois… repris-je en baissant les yeux tristement. C’était avant ta naissance, quand on s’est mariés maman et moi. On a été à Cuba. C’était superbe ! » C’était le plus beau souvenir que j’avais avec Penny, en plus de la naissance de nos enfants, bien entendu. Les voyages ne me manquaient pas plus que cela, parce que je n’avais personne avec qui les partager.

La réaction de son père n'étonne pas Sasha, une autre l'aurait un peu plus surprise. Mais au final il réagit toujours de la même façon. Calme et droit au but. Et puis, Sasha sait que c'était un atout pour le travail que son père fait. C'est pour ça qu'il est un bon avocat.
La jeune femme, regarde son père, en attendant qu'il lui réponde.
Oh, le voyage de noce de ces parents, voilà qu'elle n'a jamais entendu parler de ça.
Elle part se mettre dans les bras de son père, bien plus détendu que tout l'heure quand elle devait lui annoncer ses nouvelles à son sujet.

- Papa... tu peux me raconter ?

La jeune blonde, ce demande si il va accepter, elle sait que c'est douloureux pour lui de parler de sa mère. Même si ça fait des années maintenant qu'elle n'est plus ainsi que son petit frère.

Et voilà que j’étais parti dans mes souvenirs de jeunesse. C’était à la fois doux et très désagréable. Il était rare que je perde pied et que je revienne dans le passé, pour revivre ces émotions, ces moments où tout allait bien, où nous étions heureux Penelope et moi. C’était loin.. mais en vérité, ce n’était qu’il y a quelques années. Le temps s’était ralenti à partir du moment où elle m’avait été arrachée, comme si je devais expier mes fautes inexistantes et subir chaque jour qui passait son assassinat et le fait qu’on ait jamais retrouvé son meurtrier. « Bien sûr, repris-je, la voix beaucoup moins assurée. Que veux-tu savoir exactement ? Comment c’était Cuba.. ? ou bien comment c’était avec ta mère ? » J’imaginais bien qu’il devait y avoir un peu des deux. Je me demandais parfois si Sasha se souvenait bien de sa maman. Elle était petite quand son frère et sa mère avaient été tués… en âge de se souvenir, bien sûr, mais les souvenirs s’atténuaient avec le temps. Par exemple, je ne me souvenais plus vraiment de la voix de Penny… et ça me terrifiait. « On est partis juste après notre mariage, parce que j’avais économisé assez d’argent pour lui offrir ça. Et donc on est allé à Cuba… ! expliquai-je en caressant doucement les cheveux de mon bébé, les yeux fixés dans le vide. Il faisait toujours beau, et super chaud aussi, je n’avais eu aussi chaud. Je crois que ta mère a adoré ce voyage… » Une larme roula sur ma joue, que je chassai bien rapidement pour ne pas que Sasha la voit. Il était hors de question que je pleure devant elle, surtout pas en parlant de souvenirs aussi agréables. « On a visité la ville, on s’est baigné aussi, et l’eau était tiède, t’imagines ? Pas comme dans nos lacs ici, où c’est toujours frigorifié ! C’était très joli en tout cas, tu devrais y aller un jour… »

Mise à part les photos de mariage qu'elle avait caché dans sa chambre, elle n'avait aucune idée du mariage et du voyage de noce que ses parents avaient eu. Et si sa mère lui avait déjà parlé, elle n'en gardait aucune idée. La jeune femme, imaginait souvent sa mère et son père à l'église.... mais elle n'avait aucun détail. Alors aujourd'hui, elle va profiter que son père soit avec elle, et qu'il veuille bien parler. Ce qui était plutôt rare.
Cuba alors, le sable blanc, la mer bleue.....

- En voyage de noce ?

La jeune blonde souris tout en faisant un clin d'oeil à son paternel. Elle savait que ça pouvait embêter son père de la voir marié, et puis le fait qu'elle grandisse aussi, parce qu'au final.... il ne l'a pas spécialement vue...

- Et à votre mariage ? Maman elle était nerveuse ?

L’idée que Sasha puisse un jour se marier me terrifia soudainement, mais je savais qu’elle avait voulu me charrier. Il fallait bien que je me rende à l’évidence. Elle n’allait pas rester mon bébé toute sa vie, et j’avais déjà gâché une bonne partie des moments que nous pourrions avoir ensemble. Ce n’était pas le moment d’être un gros hypocrite, je l’avais cherché. Il fallait qu’elle soit heureuse dans la vie. C’était tout ce qui m’importait, en réalité. Qu’elle soit heureuse, avec un homme ou une femme qu’elle aimait, qu’elle fonde la famille qui lui plaisait. Et moi, je serais heureux aussi.

Sasha me faisait me replonger dans mes souvenirs de mariage et un sourire triste étira mes lèvres. Je me souvenais de ce jour béni comme si c’était hier, et pourtant, les années avaient défilé. « Elle était moins nerveuse que moi ! plaisantai-je en fermant les yeux. Je crois que même durant mon premier jugement et la première fois que j’ai dû défendre un accusé devant tout un tribunal, je n’ai pas autant flippé qu’à ce mariage ! » C’était vrai, j’avais été un sacré froussard. J’avais peur que quelque chose n’aille pas et gâche tout, et j’avais peur de ce que représentait toute cette cérémonie, alors qu’il n’y avait en réalité rien de méchant. « Tu connais ton grand-père, il peut être terrifiant quand il s’y met, et j’épousais sa fille ! J’avais intérêt à tout faire bien. » Par la suite, nous étions devenus très amis. Je me disais que si Sasha devait se marier un jour, je serais peut-être aussi terrifiant que lui, sans aucun doute même. « Et ta mère, non, elle était parfaite, comme toujours ! Elle était très belle, surtout. » Sasha lui ressemblait beaucoup, j’avais l’impression de la voir parfois. Dans un sens, j’espérais bien fort qu’elle se marie, parce qu’ainsi j’aurais la chance de pouvoir la comparer avec sa mère, et lui rappeler combien elle lui ressemblait, et la rendre fière !

Toutes les paroles de son père,Sasha les imaginais très bien grâce aux photos qu'elle avait pu voir lors du déménagement et qu'elle avait avais gardé caché secrètement dans sa chambre.

- Maman était toujours très belle....

Même si parfois, elle oublie son visage, alors sa voix, il ne faut même pas y penser.
Le jeune femme, avait beaucoup de mal à se rappeler de sa mère, mais il y a une chose qu'elle n'oubliera jamais, c'était ses caresses sur sa joue le soir.

- Papa... tu n'auras pas une vidéo de maman et de Samuel ?

Sasha est très mélancolique se soir et bien plus détendu maintenant qu'elle avait avoué à son père tout ce qu'elle lui cachait. Cependant, elle aimerai vraiment des soirées comme ça bien plus souvent.

Sasha avait raison, sa mère était toujours magnifique, quoi qu’il puisse arriver. Elle avait ce sourire, dont ma fille avait hérité, qui la rendait rayonnante à chaque seconde. J’étais tombé amoureux d’elle au moment même je l’avais vu, et je n’avais probablement pas été le seul dans sa vie. Mais c’était moi qu’elle avait choisi pour continuer dans ce monde étrange, et j’en avais été ravi, toujours, jusqu’à ce que ce soit terminé. Et la fin avait été tellement difficile à supporter… si difficile que je n’avais pas réussi à la surmonter. Et c’en était suivi tout ce que Sasha connaissait. « J’en ai sur mon ordinateur, tu me laisses aller le chercher ? lui demandai-je en souriant. » Elle s’écarta de moi et je me dépêchai de monter dans la chambre pour récupérer mon ordinateur personnel pour le redescendre dans le salon, sans oublier de prendre avec moi le précieux disque dur où se trouvait tous les souvenirs de famille. Puis, je me réinstallai dans le canapé, pour l’allumer et retrouver les vidéos les plus récentes que je pouvais avoir. Elles dataient de si longtemps… je les avais presque oubliées. J’en lançais une au hasard et le rire enfantin de Samuel emplit alors la pièce d’un bonheur passé. Je repris Sasha contre moi et la serrai longtemps dans mes bras, en fixant l’écran de l’ordinateur, sur lequel la vidéo continuait de montrer Samuel et Sasha se courir après, dans le jardin de notre ancienne demeure. J’avais filmé tout ça, sans raison à l’époque, juste pour pouvoir garder des souvenirs. Je n’aurais jamais pensé qu’ils auraient tant d’importance, par la suite. Et maintenant, les regarder après tant d’années, c’en était douloureux à crever… mais aussi très rassurant. Ils étaient toujours là, avec nous, quoi qu’il arrive. « Ils me manquent tous les deux… » Bien entendu, rien ne changerait le passé, rien ne pourrait nous les ramener. Et ces souvenirs en vidéo étaient les seuls que nous nous créerions…

Pendant qu'Aaron est partie à l'étage, Sasha en profite pour envoyé un message à Fergus, lui disant qu'il a gagné un rendez vous avec son père avant de partir. Elle n'a pas eu le temps d'attendre une réponse de sa part. Son père arrive, s'installe de nouveau sur le canapé, et lorsqu'il lance une vidéo, Sasha ne peut plus se retenir. Les larmes silencieusement coulent le long de ses joues, aucun sanglots ne sort. La jeune femme est envahit d'émotion forte qu'elle pensais enfouie en elle depuis bien longtemps, un mélange de bonheur et de tristesse sans fin.
Entendre le rire de son petit frère, elle en avait plus du tout le souvenir.
La jeune blonde essuie ses larmes avec sa manche discrètement, si Fergus était là, il se moquerait bien d'elle. Mais il ne l'a verra jamais, ou presque jamais dans cet état là, si ça continue entre eux assez longtemps.

- Maman un peu plus, Sam me tirait tout le temps les cheveux.

Elle sourit, et rit un peu pour cacher sa peine, et pour évité de se montrer vulnérable devant son père.