good day for a fight, no ?!

J’étais un peu mal à l’aise. Je n’avais pas envie que ma fille assiste à notre échange, parce qu’elle était assez grande pour comprendre certaines choses maintenant, et elle commençait à me poser des questions. J’étais embarrassée à chaque fois ? Comment dire à sa propre fille qu’elle ne reverrait jamais son père parce que celui-ci avait été malade ? Je ne voulais pas lui faire du mal et pourtant, elle en souffrirait, un jour ou l’autre.

La jeune femme en face de moi me semblait complètement désemparée, comme si elle aurait voulu dire quelque chose de particulier, mais qu’elle se retenait de le faire. Elle pouvait tout dire, de toutes façons, il y avait une chance sur deux pour que je le prenne mal. Et puis, j’avais ma fille dans les bras, je ne pouvais pas parler comme je le voudrais, alors elle pouvait bien faire des commentaires, je ne m’énerverais pas. Néanmoins, je vis de la tristesse passer dans les yeux d’Amelia, et je n’osais pas lui dire quoi que ce soit pour la faire parler. Je préférais ne pas le faire, de peur qu’elle ne se venge par la suite. Je décidai donc de continuer, en utilisant un langage codé pour que ma fille ne m’entende pas mal parler.

« Vous me demandiez comment ne pas déraper dans ces moments-là… en réalité, c’est difficile ! Ils provoquent, jusqu’à ce que l’on cède. Il faut les ignorer, et c’est dur… »

good day for a fight, no ?!

Ma fille se cala dans mes bras, sans rien dire, et j’étais un peu pieds et poings lies. Johanna était adorable, à me faire des câlins comme ça, mais ce n’était vraiment pas le moment. Sauf que si je lui disais de s’en aller, elle se mettrait à pleurer cette petite capricieuse – le portrait craché de son père ! – et je n’avais vraiment pas envie de perdre plus de temps que cela.

« Très bien, je vais vous laissez en famille ... »

J’étais surprise, il fallait que je l’avoue. Je ne pensais pas qu’elle partirait aussi tôt, je pensais qu’elle avait beaucoup plus de questions, et de fait, je posai Johanna par terre en lui disant que je revenais immédiatement et je suivis Amelia jusque dans l’entrée, pour qu’elle m’explique. Quelque chose me disait pourtant que je n’allais pas avoir d’explications, malheureusement ! Elle ouvrit la porte et je restai, pour la regarder faire, vraiment étonnée.

« Si jamais vous avez des soucis prévenez moi, je sais que j'ai peu d'influence, mais j'ai des contacts des personnes de confiance et si je peux protéger votre famille je le ferais ... »

D’un regard, je la remerciai, mais je n’arrivais toujours à comprendre pourquoi elle ne restait pas plus longtemps. Elle avait tellement galéré pour obtenir une « audience », si on pouvait appeler cela comme ça, alors pourquoi partait-elle si vite ? Non pas que je voulais qu’elle reste, mais il n’y avait aucune logique dans son comportement !

« Toutes ces histoires commencent à se tasser et bientôt, les gens en auront marre de parler de moi. Je vous remercie pour votre aide, mais je n’en aurais pas besoin je pense… »

Je lui offris un sourire sincère et regardai mes enfants, en tournant légèrement la tête pour les observer discrètement. Le regard d’Amelia se porta également sur eux.

« Tout ce que je veux, c’est retrouver une vie normale… pour eux ! »

Moins je faisais parler de moi, et mieux ce serait. C’était pour cette raison que je ne voulais pas donner d’interview ou quoi que ce soit !

good day for a fight, no ?!

Nous restâmes quelques instants silencieuses, en regardant mes enfants jouer ensemble. Johanna aidait son frère à empiler des cubes  les uns sur les autres, avant de les faire tomber en riant. Il en fallait peu pour qu’ils soient contents et qu’ils rient ces deux-là… un peu comme leur père, en réalité. Ils tenaient beaucoup de lui, plus que de moi, mais je savais qu’en grandissant et en vivant toujours avec moi et seulement moi, leurs caractères changeraient un peu.

« Je vous le souhaite de tout coeur ... et si jamais vous avez simplement envie de parler sachez que je sais écouter et ce n'est pas l'animatrice radio qui parle .. »

J'étais touchée qu'elle me dise cela, mais ce serait la dernière personne que j'appellerais pour avoir de l'aide. Je voulais me débrouiller toute seule et elle avait peut-être des contacts, mais justement, je ne voulais pas que l'on sache que j'étais ici. Personne d'important en tout cas... Néanmoins, je n'eus pas le temps de lui répondre que je la vis changer d'expression. Elle semblait avoir peur.

« Amelia, vous allez bien ? »

Elle se retourna vers moi et ses yeux semblaient emplis de terreur...

good day for a fight, no ?!

Sans prévenir, la jeune femme me répondit le plus possible que tout allait bien et qu'elle allait me laisser, et ni une, ni deux, elle fila pour partir et rentrer chez elle. Je la regardai partir presque en courant, sans vraiment comprendre et me demandai alors si j'avais fait le bon choix de l'appeler ce soir-là. Etrange... cette fille était vraiment étrange, en plus de me taper sur les nerfs. Néanmoins, j'étais curieuse d'entendre ce qu'elle pourrait dire avec le peu d'informations que je lui avais donné. Je pensais qu'elle allait se baser là-dessus pour faire son boulot, à moins qu'elle n'ait trouvé un deuxième pigeon qui pouvait faire l'affaire... tant mieux, si c'était cela. Je n'avais pas envie d'être utilisée.

Curieuse, j'écoutais son émission plusieurs fois de suite, et jamais, elle ne parla de ce sujet. Peut-être avait-elle abandonné ? Non, ça ne pouvait pas être le cas. Alors je persévérais, et je continuais d'écouter chaque soir, en m'occupant des enfants. Jon s'absentait souvent ces derniers temps, alors j'avais tout le temps pour ça. Et finalement, elle évoqua le sujet que j'attendais. Heureusement qu'elle le faisait d'ailleurs, parce que j'en avais marre d'écouter la radio. Je n'avais jamais aimé écouter la radio.

L'émission passa et j'écoutai attentivement chaque avis, le sien et ceux des auditeurs. Ils étaient d'accord avec ce qu'elle disait, moi aussi d'ailleurs, mais je trouvais toujours déplacé qu'elle essaye d'aider les gens qui ne demandaient pas d'aide. Il fallait comprendre que nous n'étions pas si mal lotis, et que si nous avions besoin d'aide, nous connaissions déjà les techniques et les personnes à appeler. J'allais me retenir de lui dire ça, sinon je sentais qu'elle me ferait encore tout une histoire... Je pris néanmoins mon téléphone pour l'appeler et lui dire ce que j'avais pensé de tout cela. Plus par politesse que par envie, il fallait bien le dire. Elle décrocha au bout de quelques tonalités.

« Bonsoir Amelia, je viens d'écouter votre émission et je dois dire que je ne suis pas surprise des réactions que vous avez suscité. Vous avez particulièrement bien réussi à dire le message que vous vouliez passer... »

Un peu d'éloges dans ce monde de brutes, ça ne pouvait pas faire de mal...

good day for a fight, no ?!

Au bout du fil, je compris qu’Amelia devait être contente de ce que je venais de lui dire. J’avais essayé d’être la plus naturelle possible, et de paraître sincère. Tout ce que je lui disais n’était pas un mensonge, fort heureusement, mais je brodais un peu, pour sembler gentille, ce qui n’était pas forcément le cas avec elle. Mais je voulais imposer certaines limites, même si elle était de mon côté. Je ne pouvais tout simplement pas lui accorder plus de crédit. Ce n’était pas possible… juste pas possible.

« Merci, je suis ravis de savoir que vous avez écouté l'émission, je dois vous avouez que j'avais hésiter à la faire, suite à notre conversation ... »

Elle avait hésité à cause de moi ? Elle pouvait bien faire ce qu’elle voulait de toutes façons, ce n’était pas moi qui décidais. Si elle voulait évoquer ce sujet dans son émission, elle pouvait le faire. Alors pourquoi avait-elle hésité ? Je n’osais pas lui demander, parce que pour elle, ça devait être évident. Au lieu de quoi, je lui répondis quelques mots polis :

« Vous avez bien fait de le faire quand même. »

Ce serait suffisant pour elle comme pour moi. Un long silence s’installa au téléphone, et je ne sus que dire de plus pour entamer la conversation. J’étais mal à l’aise, et il me fallait dire quelque chose, c’était moi qui l’avais appelée, il fallait bien que je fasse un peu la conversation…

« En tout cas, vous avez très bien mené le sujet. Et vos auditeurs avaient l’air plutôt contents.. »

C’était bateau, mais c’était tout ce que j’avais pu trouver… malheureusement. D’habitude, j’étais plus loquace…

good day for a fight, no ?!

Le silence perdura entre nous deux. C’était gênant, de ne pas savoir quoi lui dire pour continuer la conversation, et pourtant… je ne faisais rien pour que tout continue. Et elle non plus en réalité. Enfin, je pensai trop vite, puisque quelques secondes plus tard, elle reprit la parole, de l’autre côté du téléphone. Elle me répliqua qu’elle n’avait pas fait grand-chose, que c’était les auditeurs qui avaient fait tout le boulot. Je n’étais pas du tout d’accord, c’était quand même elle qui avait préparé le sujet, et les auditeurs ne faisaient qu’avoir un avis et réagir. Ce n’était pas vraiment la même chose, mais je n’allais pas la contredire, ce n’était pas la peine d’entrer dans le débat.

« Je ... je suis désolé si je vous ai dérangé ... »

Je restais silencieuse. Que pouvais-je répondre ? Que ce n’était rien ? Qu’elle ne m’avait pas du tout dérangée ? C’était faux. Elle m’avait dérangée, et elle m’avait gonflée aussi, mais au final, je l’appréciais un tant soit peu. Je ne voulais pas d’elle dans ma vie, c’était tout. Mais je ne la détestais pas et puis, j’appréciais un minimum son travail et le coup de gueule qu’elle avait passé à la radio. C’était l’une des rares qui se permettaient de faire ça, et ça ne m’inspirait que de la sympathie, évidement.

« Ce n’est rien, croyez-moi. »

Je souris, toute seule et dans le vide, puisqu’elle ne put pas me voir le faire, mais je savais qu’elle devait le sentir. Ces choses-là se sentaient, quand elles arrivaient. Cependant, je pensais à autre chose, et immédiatement, la conversation me revint. Quand elle était partie de chez moi, l’autre soir, elle semblait complètement effrayée, et ça m’avait rudement intriguée. Alors je voulais savoir ce qu’il se passait.

« Amelia, l’autre jour, vous sembliez avoir peur ? Tout va bien ? »

Le silence reprit de nouveau ses droits. J’avais l’impression que c’était presque une tradition entre elle et moi, étrangement…

good day for a fight, no ?!

Un long silence s’installa de nouveau et je commençai à être agacée par cette ambiance glaciale et méfiante qu’il y avait entre nous. Je lui demandais simplement si tout allait bien, ce n’était quand même pas insurmontable, si ? Elle pouvait bien me répondre ce qu’elle voulait de toutes façons, je ne serais pas là pour vérifier qu’elle me disait la vérité ! Je faillis soupirer, mais avant que j’aie le temps de le faire, je l’entendis me répondre que tout allait bien. Eh bien voilà, ce n’était pas si compliqué à dire ! Pourquoi hésitait-elle autant ? Si elle voulait me mentir, autant bien le faire, parce que là, je ne la croyais pas du tout, la petite ! C’était ridicule d’attendre aussi longtemps pour parler. Mais elle n’attisait pas ma curiosité. Elle me paraissait carrément antipathique et je me fichais pas mal de savoir comment elle se sentait, c’était juste de la politesse.

« Sur quoi allez-vous travailler maintenant ? Sur quel sujet ? »

Puisqu’apparemment, c’était son boulot qui la passionnait plus que tout, et que je détestais les conversations qui s’éternisaient, je décidai de la faire parler un peu, avant de pouvoir prendre congé d’elle. Je n’aurais qu’à prétexter une bêtise faite par l’un de mes enfants. Ils dormaient, mais ce n’était pas grave de toutes façons. Moi, quand je mentais, je le faisais bien, au moins.

« C’était un succès ce coup de sang, vous devriez recommencer sur d’autres thèmes ! »

Qu’est-ce que j’étais en train de faire là ? Je lui donnais des idées pour qu’elle travaille, mais n’importe quoi…

good day for a fight, no ?!

Parfaitement consciente que mes propos n’allaient pas plaire à Amelia, je n’arrêtais cependant pas de les prodiguer, histoire de bien lui faire comprendre mon point de vue. Et puis après tout, c’était bel et bien mon point de vue, j’avais bien le droit de le lui dire, non ? Libre à elle d’en tenir rigueur ou non. De toutes façons, c’était peut-être la dernière fois que nous parlions. En tout cas, je n’avais pas l’intention de la rappeler après cela, à part si elle voulait encore des informations.

« Je ne sais pas pour le moment ce qui est prévu c'est surtout des interviews et rencontrent dans les concerts ou festivals ... mais je penses ouvrir de nouveau débats ... »

J’étais impressionnée qu’elle décide de me répondre si gentiment. Je m’attendais presque à ce qu’elle me saute à la gorge. Surprise, je ne sus que répondre au départ, puis j’analysais ce qu’elle m’avait dit. En effet, elle allait pouvoir commencer les interviews d’artistes en festivals. La saison allait commencer, et elle aurait du boulot. J’avais cru comprendre qu’il y avait pas mal d’activité à Toronto, en ce qui concernait la musique. Je n’allais pas en faire part en tant qu’artiste, mais il était clair que j’allais pouvoir y emmener les enfants pour leur faire découvrir d’autres choses. Peut-être que nous pourrions y aller avec Jonathan. Toute ma médiatisation s’était calmée, maintenant je pouvais sortir dans la rue sans être complètement photographiée de partout, c’était beaucoup plus agréable. Soudainement consciente du fait que j’étais partie dans mes pensées et que je ne lui avais pas répondu, je me repris bien vite.

« Je suis sûre que vous serez super. Depuis combien de temps exercez-vous ce métier ? »

Pourquoi je faisais ça ? Aucune idée. Je me fichais pas mal de sa vie, mais pourtant, c’était étrange, je n’arrivais pas à raccrocher, alors que je n’avais qu’une envie, c’était de le faire.

good day for a fight, no ?!

Bien que je m’en fichais totalement, j’attendais la réponse d’Amelia avec impatience. En réalité, plus vite elle répondrait et plus vite nous pourrions soit rebondir sur autre chose, soit raccrocher. Evidemment, j’espérais que la deuxième option soit la bonne et celle que l’on choisisse. Et pourtant, je sentais que ça n’allait pas se passer ainsi, malheureusement.

« J'exerce depuis 5 ans maintenant ... c'est un véritable plaisir car je ne fais jamais la même chose. »

Cinq ans ? Mais elle était très jeune, pourtant, alors elle n’avait dû faire que ça de sa vie ! C’était assez incroyable qu’une jeune femme décide de faire de la radio, comme ça, sans avoir rien expérimenté d’autre. A croire que c’était ce qu’elle voulait vraiment, visiblement, et elle se débrouillait plutôt bien, de fait. Elle avait bien réussi sa vie, apparemment, et c’était super pour elle. Elle me ressemblait un peu, dans le sens où je n’avais fait que de la musique pendant toute ma vie avant de devenir prof, et que je n’avais jamais rien voulu d’autre. Et pourtant, un jour ou l’autre tout bascule.

« J'y penses, voulez vous des places VIP pour les festivals, il m'en donne toujours plein et je ne vois pas vraiment avec qui les faire partager ... »

Sans vraiment savoir quoi lui répondre, parce que je pouvais déjà avoir des places gratuites avec l’université, en tant que prof, je me rendis compte qu’elle avait le cœur sur la main, ou bien alors qu’elle n’avait personne avec qui partager des places VIP… Et pourtant, elle devait en connaître du monde, dans le milieu. Elle était animatrice radio, elle était passionnée, et j’étais sûre qu’elle devait s’être fait un nom.

« C’est très aimable, mais je suis sûre que vous connaissez d’autres personnes qui pourraient vouloir ces places ! Je peux en avoir avec mon travail, c’est pour ça… »

Loin de moi l’idée de paraître impolie, mais je préférais en plus refuser, pour ne pas être amenée à la revoir une fois de plus. J’avais presque du mal à me reconnaître et malgré sa gentillesse apparente, je ne voulais pas faire ami-ami avec elle.

good day for a fight, no ?!

J’espérais réellement qu’Amelia n’allait pas le prendre mal, une fois de plus. Elle avait l’air d’être plutôt susceptible, cette jeune femme et je n’avais l’intention de me battre verbalement avec elle, à nouveau. Ce n’était pas la soirée pour, et en plus, elle devait avoir d’autres choses à faire. C’est pourquoi je fus très satisfaite quand je compris qu’elle n’était pas fâchée.

« Si jamais ils en ont plus n'hésitais a me demander ...
- Je n’hésiterai pas, promis ! »

Encore une fois, le silence dura quelques secondes. Je n’avais pas vraiment l’habitude de faire de telles conversations au téléphone. Peut-être que finalement, je n’aurais pas dû l’appeler. Et si je m’excusais pour ce que j’avais fait et comment je m’étais comportée ? Après tout, quitte à ne plus nous parler par la suite, autant qu’elle ait une bonne opinion de moi et que j’en ai une bonne d’elle, non ?

« Est ce ... est ce que je peux vous posez une questions? c'est juste pour moi ce n'est pas la présentatrice qui parle ... »

J’étais surprise par sa demande. Qu’avait-elle à me demander sans que ce soit pour les besoins de son émission ? Et surtout, de quelle nature était la question ? J’hésitais, soudainement, et pourtant, je sentais dans sa voix que ça n’allait pas être quelque chose de gênant ou de méchant, au contraire…

« Allez-y ! A moi de juger si je peux vous répondre ou non ! »

J’étais plutôt fière de ma solution, et je devais avouer qu’au moins, j’étais tranquille comme ça !

good day for a fight, no ?!

J’avais la vague impression que sa question allait me perturber… ou du moins m’impressionner.. Enfin, en gros, que je ne m’y attendrais pas, en réalité. Avec elle, on ne pouvait jamais savoir, évidemment. J’avais compris qu’elle était le genre de femme qui était très franche, très directe, qu’elle ne prendrait pas de précautions pour parler et qu’elle allait droit au but. Pourtant, cette fois, elle me semblait presque hésitante, comme si elle avait peur que je ne lui réponde pas… ou bien peur de ma réponse. Néanmoins, je ne voyais pas ce qu’il y avait à craindre, je n’étais pas non un monstre.

« Voilà, je voulais savoir comment vous avez géré votre passage de l'ombre à la lumière, si vous aviez une astuces a me donner, que vous avez utilisé après qu'on est connu votre visage car ... je vais bientôt le vivre, enfin on m'y force et ... je ne sais pas comment gérer ca. »

Oh, je comprenais mieux. C’était parce que ça touchait à ma célébrité, et qu’elle ne savait pas comment l’annoncer. En tout cas, j’étais surprise qu’elle me dise tout cela. Après tout, qui étais-je pour lui donner des conseils ? Bon évidemment, j’avais été célèbre, donc elle imaginait que je pouvais l’aider… et elle n’avait pas tort, en soit. Donc , je réfléchis quelques secondes, pour bien choisir mes mots et tenter de lui donner des pistes. Me replonger dans mon passé n’était pas une super idée, mais si je pouvais l’aider, j’allais le faire !

« Eh bien… j’ai tenté de rester la plus normale possible. Je n’ai pas tant changé, en soit. J’ai gardé mes habitudes, jusqu’à ce que ce ne soit plus possible de le faire… Mais au début, il ne faut surtout pas se laisser emporter et savoir dire non aux gens. Je pense que vous saurez le faire ! »

Satisfaite de ma réponse, je me disais qu’elle y arriverait plutôt bien…

good day for a fight, no ?!

En réalité, je ne savais pas exactement si c’était ce genre de conseils qu’Amelia recherchait. Je me doutais qu’elle n’aurait pas la même situation que moi. Il y avait une différence entre devenir violoniste professionnelle pour un grand groupe – ainsi que se marier avec le leader – et se faire connaître de force, par sa boîte de production de radio. Alors j’espérais néanmoins que mes conseils allaient faire effet… ce serait bien pour elle. Et puis, au fond, toutes les célébrités devaient faire la même chose non ? Sauf celles qui souhaitaient se faire remarquer, bien sûr !

« Bien ... rien changer jusqu'au moment ou c'est impossible et dire non ... je pense que je suis capable de le faire ... je vous remercie vraiment de m'avoir conseiller, d'avoir pris du temps pour me répondre et aussi m'appeler ... »

Elle n’avait pas à me remercier, je l’avais appelée parce que je le voulais bien. Sinon, je ne l’aurais clairement pas fait. D’ailleurs, je me demandais bien pourquoi je l’avais fait, mais au final je pensais avoir fait la bonne action. Après tout, c’était la moindre des choses. Pourtant, maintenant je sentais que nous arrivions vers la fin. Que pouvait-on dire de plus ? Elle m’avait posé sa question, elle n’avait plus rien à me demander… nous en avions terminé, non ? Et puis, j’avais bien d’autres choses à faire, des cours à préparer, des devoirs à corriger… des trucs de prof, quoi.

« Je crois que je dois vous souhaiter une bonne continuation alors, Amelia… »

Je m’arrêtai dans ma phrase, la laissant en suspens, histoire de ne pas en dire trop non plus, pour ne pas lui donner envie de continuer à me parler.

good day for a fight, no ?!

Alors que je venais de lui souhaiter une bonne continuation, j’entendis la jeune femme s’affairer de l’autre côté de la ligne, comme si elle revenait sur Terre brusquement après avoir été perdue dans ses pensées pendant trop longtemps. Je pensais qu’elle allait me retourner la politesse et ensuite raccrocher, mais je l’entendis encore s’emmêler les pinceaux dans tout ce qu’elle racontait et finir par me sortir une longue tirade, alors que je levais les yeux au ciel :

« Oh mince ... je suis désolé de vous avoir monopolisé ainsi, vous avez surement des choses à faire ... je vous souhaite une bonne soirée, continuation aussi et n'hésitez pas si vous avez besoin de place ou pour autre à me contacter, je serais ravis de vous reparler et de vous aider. »

Souriant poliment, alors qu’elle ne pouvait pas me voir le faire, je cherchais quoi lui dire exactement pour lui répondre et clore la conversation. Je ne devais pas paraître trop sûre de moi et pas non plus trop expéditive, ce serait désagréable, et je n’aimais pas être comme ça. De plus, je l’avais suffisamment été avec elle pour le peu que nous nous étions vues et le le peu de fois où nous avions parlé, toutes les deux.

« Merci à vous Amelia. A bientôt, peut-être. »

Avant qu’elle ne puisse répondre quoi que ce soit d’autre, je raccrochais, bien trop heureuse d’avoir pu avoir le dernier mot et d’être « débarrassée » d’elle, même si évidemment, c’était un peu méchant de ma part…