Je suis physiquement comme mon père ; un grand dadais d'un mètre quatre-vingt cinq, aux cheveux bruns et aux yeux bleus. J'ai l'air enjôleur mais je ne le suis pas. J'ai un visage fin, aux traits néanmoins durs. Si je n'entretiens pas vraiment mon corps, on ne peut pas dire que je suis mal non plus. Côté vestimentaire, je m'habille toujours de façon sombre, un peu passe-partout, pour me mêler à la foule de Toronto. 
Je n'aime pas les gens, je n'aime pas me retrouver en leur compagnie et je supporte difficilement mes collègues de travail, déjà. J'ai toujours eu cette aversion envers les autres et j'ai souvent été seul, sans pour autant être méchant. Ah et depuis mon divorce, je hais les femmes.

En trois mots : perspicace, curieux, imperturbable. 
Je réfléchis toujours avant d'agir, je ne fais rien sans y avoir pensé. Je m'intéresse à de nombreuses choses parfois inutiles et quand je travaille sur un sujet particulier, je ne lâche pas l'affaire. En tant que journaliste, c'est une qualité recherchée. En tant qu'être humain, c'est un défaut atroce. Et enfin, j'ai vécu tellement d'épreuves difficiles que rien ne peut m'atteindre maintenant. Pas même la pitié.

Terrible décès dans un drame atroce

Toute l'équipe de la rédaction est bouleversée par cette nouvelle : notre consoeur et collaboratrice Annie Bennett est décédée lors de l'effondrement des tours du World Trade Center, mardi dernier. Elle laisse derrière elle notre confrère Mike Bennett et son fils, Thomas, âgé de quatorze ans. Nous pensons tous à la famille Bennett, ainsi qu'aux autres victimes du drame new-yorkais. 

Le journaliste pris en otage en Syrie exécuté

Nous avions relaté il y a trois jours l'information selon laquelle Mike Bennett était retenu en otage à quelques kilomètres de Damas. Aujourd'hui, c'est avec tristesse que nous avons appris son décès. Dix ans après la mort de sa femme lors de l'effondrement des tours du World Trade Center, la rédaction est de nouveau de tout coeur avec sa famille, notamment son fils, Thomas, âgé de vingt-quatre ans, notre confrère et collaborateur au Globe and Mail. 


Thomas, c'est moi. Je suis journaliste au Globe and Mail, depuis huit ans. J'ai trente-et-un ans. Mes parents sont morts. Ma femme est partie avec un autre, en emportant ma fille. En gros, ma vie n'a pas été très heureuse. Après la mort de mon père, j'ai cru pouvoir m'en remettre grâce à la famille que je construisais, et finalement j'ai été encore plus détruit qu'avant. J'ai donné ma confiance à une femme qui ne la méritait pas. Elle est à présent quelque part en Angleterre, loin de moi. Elle ne me donne aucune nouvelle. 
Hormis cela, mon enfance a été plutôt calme. Avant la mort de ma mère, lors des attentats du 11 septembre, nous étions une famille unie, sans histoires. Mes parents n'étaient pas souvent là, ils voyageaient beaucoup mais nous faisions très souvent des séjours ensemble, des week-end ou des vacances. Nous n'étions pas dans le besoin, jamais. 
Quand je me suis retrouvé seul avec mon père, la situation s'est un peu dégradée, mais je suis resté calme, bon élève, et en 2010, j'ai réussi mon concours pour devenir journaliste, et, grâce à mon père, je suis entré à la rédaction du Globe and Mail, après une licence et deux ans d'école de journalisme. J'ai été relégué à une place moins importante de ma boîte. On m'a alors demandé de faire le reporter de terrain. Du coup, j'arpente Toronto à la recherche de sujets, de scoops, et même si ce n'est pas ce qui manque, j'ai encore un mal à accepter ce nouveau statut, que je considère très mal. En tout cas, je mène toujours mon travail à bien, même celui-ci. Et si jamais vous me croisez, vous ne devriez pas trop m'accorder votre confiance. Mon patron est comme un vautour. Et s'il veut quelque chose que vous détenez... il l'aura, par mon aide !