que la leçon commence...

apprendre c'est bien, se rincer l’œil en même temps, encore mieux.

Parfois elle se demandait encore ce qu'elle fichait là et quelle mouche l'avait piquée de se remettre à faire des études à son âge. Franchement, elle aurait très bien pu s'en passer et se contenter de trouver un autre petit job, aux horaires intenables et à la paie ridicule. Bon, ça c'était déjà le cas en ce moment, puisqu'il fallait bien faire en sorte de s'en sortir financièrement sans son ancien salaire et avec les frais de scolarité (heureusement bien moindre que ceux qu'elle aurait eut à payer si elle avait fait ça aux États-Unis). Mais dans le fond, elle savait bien que c'était pour un meilleur avenir, plus serein en tout cas pour ses nerfs et son équilibre mental, qu'elle était là. Et puis ça n'était pas si mal d'avoir repris le chemin des bancs de l'université, elle s'était fait de nouveaux amis et connaissances, même si la plupart avaient quasi une dizaine d'années de moins qu'elle. Pas spécialement un frein ou une source de problèmes vu que ceux avec qui elle traînait le plus avaient le même état d'esprit qu'elle. Non, surtout ce qu'elle aimait bien à la fac, c'était son prof de chimie. Enfin, aimait bien c'était pas vraiment le bon terme, disons simplement qu'il lui avait tapé dans l’œil. Après tout, il était super mignon, un brin timide, ce qui pour elle ne le rendait qu'encore plus attirant à ses yeux. Bref, vous pouviez être sûrs que pendant son cours, la rouquine ne perdait pas une miette de son cours, même si pour autant, ce qu'il disait pendant ce dernier ne parvenait pas forcément à son cerveau. Heureusement, pour ça, il y avait son ordi et elle enregistrait le cours pour le retranscrire ensuite chez elle, une fois la distraction principale hors de son champ de vision.

Et par chance, aujourd'hui c'était cours magistral de chimie ! Enfin chance pour elle, pour le pauvre Ciaran, peut être un peu moins. Avant d'arriver sur le campus pour son cours, Sidney avait donc fait un petit détour par un café non loin, histoire de prendre un vrai café, qui la tiendrait éveillée pour la journée, et puisqu'elle y était, elle en avait pris un aussi pour son professeur. Vu qu'elle arrivait toujours parmi les premières et qu'en général, lui aussi avant de l'avance, elle s'était dit que ça serait un petit geste qui lui ferait plaisir. Ça n'était en aucun cas un moyen pour elle de s'attirer ses faveurs, pas consciemment en tout cas mais certainement pas pour obtenir de meilleures notes puisqu'elle s'en sortait plus que bien déjà de ce côté là. Puis au pire personne ne la verrait faire si elle se contentait de déposer le gobelet sur le bureau sur l'estrade, pas vrai ? Elle filait donc vers l'amphithéâtre, gribouillant un petit mot sur le gobelet et pénétra dans la salle, encore déserte. Quelle satisfaction c'était ça d'ailleurs. Un amphi vide, sans un bruit. Une autre raison pour laquelle elle aimait arriver plus tôt, pour pouvoir profiter de ces instants de calme avant que l'endroit ne se transforme en une ruche bruyante et surpeuplée. Déposant le gobelet de café encore bien chaud sur le bureau, elle alla prendre sa place, déposant sa veste sur ses genoux, enfilant ses lunettes sur le bout du nez et installant le reste de ses affaires pour avoir à les bouger le moins possible quand les autres allaient lui passer devant pour aller s'asseoir dans sa rangée. Elle chantonnait doucement, écouteurs dans les oreilles quand la porte s'ouvrit derrière elle pour laisser entrer quelqu'un. Son prof était arrivé, même si pour l'instant, la demoiselle n'en avait pas la moindre idée, sinon elle se serait peut-être passé d'improviser une petite chorégraphie sur sa chaise.

que la leçon commence...

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A la base, elle ne s'était pas attendue à tomber sur un tel prof il faut bien le dire. Lorsqu'une petite dizaine d'années plus tôt, elle avait pour la première fois arpenter ces lieux, ses profs étaient pour la quasi majorité tous des vieux messieurs qui se contentaient de lire leurs notes et d'interagir le moins possible avec leurs élèves. Peut-être un des facteurs qui à l'époque lui avait fait quitter la fac avant d'obtenir son diplôme car oui, il y en avait d'autres. Mais pas la peine d'entrer plus en détails sur tout ça, c'était du passé maintenant et son avenir c'était ce sur quoi elle voulait se focaliser à présent. Il fallait tenir jusqu'au bout cette fois, parce que sans ça, elle n'arriverait pas à se dégoter la place qu'elle visait au sein de la police scientifique. Alors oui, le fait que son prof soit totalement à son goût constituait déjà un bon point à ses yeux, histoire de maintenir sa motivation au plus haut, vu tout ce qu'elle avait à subir à côté dans ses petits boulots. Puis comme dit, ça n'était pas parce qu'il lui plaisait qu'elle allait faire quoi que ce soit de plus que de le détailler du regard pendant ses cours. Elle était bien consciente que ça serait problématique mais vu son imagination fertile, elle ne pouvait quand même s'empêcher de conserver un petit espoir. C'est bien ça qui faisait vivre à ce que dit l'adage, non ?

Toujours est-il qu'en attendant, elle s'était dit que lui offrir un petit café de bon matin ça serait une bonne idée. Ça n'était qu'un café après tout, rien de bien important, une simple petite attention pour quelqu'un qui comme beaucoup par ici, tournait à la caféine pour tenir le rythme. S'installant dans l'amphi vide et profitant du calme y régnant encore, la rouquine mis ses écouteurs dans ses oreilles, relisant ses notes sur son ordinateur, se coupant ainsi du monde l'entourant. Puisqu'elle était seule pour le moment, elle pouvait bien faire ce que bon lui semblait et c'est ce qu'elle faisait, se dandinant sur sa chaise tout en marmonnant les paroles de la chanson qu'elle écoutait. Oui, Sidney n'avait vraiment pas peur du ridicule, elle avait déjà fait bien pire en public. Non, rien de compromettant je vous rassure, mais chanter à tue-tête oui, danser ou encore d'autres bêtises du genre. Son côté femme-enfant sans nul doute, mais elle y tenait. Ça l'aidait à avancer dans un monde où tous les jours, on entendait de partout des nouvelles toujours plus déprimantes les unes que les autres.

Dans sa bulle lorsque la porte derrière elle s'ouvrit pour laisser entrer Ciaran, elle ne perçu pas sa présence et continua à se déhancher sur son siège, le regard fixé sur l'écran de son ordi. Cette chanson tournait en boucle depuis des jours dans sa tête, il faut dire que le tempo était entraînant et pour la miss, il suffisait de pas grand-chose pour la faire bouger. Mais lorsqu'elle entendit résonner son nom dans l'amphi, elle releva la tête, réalisant qu'elle n'était plus seule à présent et afficha une moue surprise. Grillée devant son prof, bien joué, se dit-elle, retira ses écouteurs par politesse avant de lui répondre après qu'il l'ait remercié pour le café. « De rien, j'me suis dis que vous en auriez besoin. » Et c'est vrai, vu qu'il semblait vraiment las, fatigué voir même abattu selon elle ces derniers jours. Bien entendu, elle ignorait qu'il venait de perdre sa sœur et que cela était sans doute la raison pour laquelle il affichait une mine aussi petite. « Café noir, j'espère que ça ira. J'ai pris ça par défaut, désolée. » ajouta-t-elle contrite, ne connaissant pas ses préférences de ce côté là, le classique café noir lui était donc apparu être la meilleure option. « Mais j'ai du sucre si jamais vous en voulez. » conclu-t-elle en sortant des bâtonnets de sucre de sa poche, qu'elle agita pour qu'il puisse les voir depuis sa place à l'estrade.

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Si on l'interrogeait sur le sujet, Sidney vous dirait que pour elle, transmettre sa passion c'était la base de l'enseignement. Réciter des notes et ne pas interragir avec ses élèves ça n'était pas ça être prof, c'était se planquer et profiter d'un revenu qu'on ne méritait pas. Ses meilleurs profs jusque là avaient tous été des personnes passionnées par ce qu'ils enseignaient, qui communiaient cette passion dans leurs cours et surtout qui n'avaient pas acquis une fausse importance de leur métier. C'était donc jour et nuit entre Ciaran qui mettait de la vie dans son cours et son autre prof de physique, qui lui se contentait de lire ses notes et de sans cesse renvoyer ses élèves à ses propres écrits. Sans surprise, c'était un des cours qu'elle redoutait le plus parce qu'avec son tempérament, elle avait le plus grand mal à ne pas se faire remarquer en arranguant le prof pour lui dire que le meilleur moyen de leur faire comprendre ce qu'il expliquait c'était de leur en faire la preuve en direct. A croire que ce pauvre vieux ronchon n'était vraiment pas familier avec le dicton qui disait qu'on apprenait bien plus en s'amusant.

En parlant de s'amuser, la rouquine était trop dans sa bulle pour entendre que dorénavant elle n'était plus seule dans l'amphi. Dansant sur sa chaise, elle écoutait de la musique comme si elle était seule au monde, comme à chaque fois. Bon, quand elle était dans les transports en commun ou dehors, elle ne bougeait pas autant, elle n'avait pas peur du ridicule mais elle ne voulait pas non plus qu'on la crit complètement cinglée non plus. Mais puisqu'ici, elle était seule jusqu'à ce qu'elle ne le soit plus, elle pouvait se lâcher. Mais lorsqu'elle entendit son nom résonner, elle compris qu'elle venait de se faire prendre en flag. On ne meurt pas de honte heureusement, sinon y a bien longtemps qu'elle aurait quitté ce bas monde. Petite consolation pour elle, le jeune homme semblait apprécié l'attention qu'elle avait eut à son égard. En même temps, en misant sur un café noir, elle n'avait pas pris énormément de risque, il faut bien le dire car oui, pour une immense majorité de personnes arpentant ces murs, c'était le carburant de premier choix. « Au moins celle-ci est encore légale. » lança-t-elle en souriant. Manquerait plus que ça qu'on interdise la caféine, le beau bordel que ça ferait si ça arrivait, pensa-t-elle une fraction de seconde avant de revenir à la réalité.

Appelez ça du pragmatisme ou de la folie, mais puisqu'elle s'était dit que son choix serait peut-être un peu trop simple, oui, elle avait embarqué avec elle des sucrettes, précisément en cas où. Et visiblement, elle avait bien fait puisqu'il en demandait. Bon, elle aurait alors pu simplement lui dire qu'elle en avait avec elle plutôt que de les secouer comme ça pour lui dire, mais ça n'aurait pas été Sidney alors. Lui souriant lorsqu'il arriva donc à sa hauteur pour venir récuprer le sucre, elle rit et baissa la tête une seconde à sa question. « Au risque de définitivement passée pour cinglée, oui, mais j'ai aussi des chips si j'ai un petit creux, des médicaments si je commence à avoir mal au crâne pendant le cours de M. Simpson. Je suis du genre à penser au pire pour m'y préparer. » lui confia-t-elle en portant son propre gobelet de café à ses lèvres pour en prendre quelques gorgées. « Pourtant je suis du genre optimiste en général. Les contradictions de la vie, je suppose. » déclara-t-elle en haussant les épaules doucement. Après tout, pour elle, c'était sa façon d'être, les deux notions n'étaient pas exclusives l'une de l'autre. Pour quelqu'un d'autre sûrement mais c'était trop tard pour qu'on la change, pas que cela soit possible de toute façon car la miss aimait qui elle était, à tort ou à raison.