La journée avait été plus qu’ennuyeuse. J’avais dû me lever tôt pour porter mes dessins chez mon éditeur et ensuite j’avais erré quelques instants dans High Park, à quelques pas de la maison d’édition. Tout en admirant la nature, encore endormie, je m’étais demandé ce que j’allais bien pouvoir faire de la journée. Je n’avais plus de commandes à réaliser et mon appartement était rempli de peintures inachevée que je ne parvenais pas à terminer. Peter m’avait conseillé de les jeter, mais je savais qu’il était encore possible que je les finisse un jour, alors elles trainaient dans tous les coins. Ce qui me valait souvent des commentaires de mes visiteurs mais personnellement ça ne me dérangeait pas. De toute façon, je n’aimais pas quand un endroit était trop en ordre, ça me coupait mon inspiration.

Après avoir fait quelques croquis, je rentrai chez moi juste à temps pour prendre l’appel de mon frère. J’avais encore laissé mon portable sur mon bureau en partant, il était moins une ! J’acceptais immédiatement quand il me proposa d’aller manger à l’Hemingway’s, ça faisait un moment qu’on ne s’était pas organisé un de ces petits dîners dont on avait l’habitude. J’avais plein de choses à raconter à mon frère ! Revigorée par la perspective de cette soirée en compagnie de Douglas, je passais le reste de la journée attendre le soir, ce qui ne la fit paraître que plus longue encore, malgré la visite de Peter pendant sa pause. Finalement, je me plongeais dans un roman environ une heure avant de devoir partir et ne vit plus le temps passer.

Quand je refermais mon livre, j’avais déjà cinq minutes de retard. Ça ne m’alarma pas, de toute façon Doug avait l’habitude ! Et puis, arriver à l’heure à un rendez-vous c’est impoli à ce qu’il parait. J’ai jamais trop compris pourquoi, mais ça m’arrange plutôt ! Je me préparai tranquillement puis sorti de chez moi en vérifiant que je n’oubliai rien. Quand j’habitais encore avec mon frère, il me rappelait toujours de prendre mes clefs, mon sac, ma veste, mon cahier de cours… Ca faisait quelques années que je vivais seule mais j’oubliai encore souvent mes affaires, comme mon téléphone ce matin. Une fois dehors, je me dirigeai à pas lents vers le restaurant, regardant tout autour de moi comme à mon habitude.

Alors que j’arrivai dans la rue de l’Hemingway’s, j’aperçu Doug devant la porte, les mains dans les poches et visiblement frigorifié. Je ne savais pas depuis combien de temps il m’attendait là mais il sembla soulagé en me voyant arriver. Je vis une petite lueur de reproche dans ses yeux, je savais qu’il aimait la ponctualité mais il me pardonnait toujours. Cette lueur disparu presque immédiatement et il me prit dans ses bras en me faisant un gros bisou sur la joue quand j’arrivai à sa hauteur.

« Rentrons à l’intérieur, je meurs de faim ! »

Je lui fis un grand sourire, contente de le voir, puis le suivit à l’intérieur. Un serveur nous désigna notre table habituelle et nous primes place l’un en face de l’autre alors que l’on nous apportait déjà nos cocktails favoris. A peine assise, je commençai à parler de tout et de rien. Mes dessins, la série que je regardais en ce moment, les déboires de ma copine Lydia qui a perdu son job récemment, ma visite au zoo dimanche dernier,… tout y passa. J’essayai néanmoins d’éviter d'évoquer Peter, ne voulant pas trop aborder ce sujet avec Doug qui avait du mal à l’apprécier. Pendant ce temps, mon frère écoutait le flux ininterrompu de mes paroles avec un petit sourire en coin. Au bout d’un moment, alors que je terminais d’expliquer comment j’avais rencontré un homme centenaire au supermarché, il me lança d’un ton amusé :

« Respire un peu, tu as le temps pour me parler, on a toute la soirée Clara. »

Je lui tirai la langue alors qu’il me renvoyait un grand sourire. Je savais que je pouvais être fatigante mais j’avais l’impression que ça faisait des années que je n’avais pas vu mon frère, il s’était passé plein de chose depuis ! C’était pour ça que j’avais tant à raconter. Je bu une gorgée de ma boisson avant de lui répondre en riant.

« Qu’est-ce que tu en sais ? Peut-être qu’une météorite va s’abattre sur le restaurant et tu n’auras jamais l’occasion de savoir ce qui est arrivé à ce vieil homme ! »

Il leva les yeux au ciel en entendant ma réponse complètement insensée. Bon d’accord, il n’y avait quasiment aucune probabilité que ce genre de chose arrive, mais elle n’était pas nulle ! Je fis un petit signe pour lui dire de laisser tomber, de toute façon je pourrai lui raconter cette histoire plus tard. La soirée ne faisait que commencer comme il l’avait bien dit !

« Bon, puisque je parle de trop, parle-moi de toi ! Quoi de neuf ? T’as une enquête intéressante en cours, t’as arrêté des méchants ? Raconte ! »

Je sautillai presque sur ma chaise, attendant toutes les infos croustillantes qu’il pouvait donner. J’avais toujours trouvé le métier de Doug passionnant et s’il refusait toujours de m’emmener avec lui lors d’une enquête, il me racontait parfois comment elles se déroulaient. J’avais parfois l’impression qu’il vivait dans un film et qu’il sauvait le monde.

Il poussa un petit soupir en m’entendant dire n’importe quoi, il fallait dire qu’il commençait à avoir l’habitude ! Son tempérament calme et plutôt sérieux contrastait avec le mien, mais pourtant nous étions toujours bien entendu. Mon côté excentrique lui apportait sans doute un peu de folie dans sa vie tandis qu’il m’apportait une certaine stabilité. Nous nous complétions plutôt bien, à vrai dire ! Il attendit un court instant avant de répondre à mes questions mais finit par céder sous mon regard insistant.

« Dernièrement j’ai fait arrêter un policier qui harcelais une femme. J’ai retrouvé un homme qui était recherché pendant trois ans par sa bienaimée. »

Waouh ! C’était vraiment génial d’être détective privé ! J’avais déjà plein de questions à lui poser sur ces deux affaires. Pourquoi le policier harcelait cette fille d’abord ? Et comme s’était passée l’arrestation, genre comme dans les films ? Et puis cette femme qui avait retrouvé son copain, comment avait-il été séparé en premier lieu ? Elle l’avait sérieusement cherché aussi longtemps ? C’était fou ce que les gens pouvaient faire par amour ! J’allais commencer à poser mes questions quand j’aperçus le grand sourire niais qui s’étalait sur son visage. Je plissai les yeux, intriguée. Mon frère ne me disait pas tout ! Il y avait quelque chose d’autre, de plus personnel pour lui… Quoiqu’il en soit, je saurai bientôt de quoi il s’agit ! Il ne pourra pas me cacher quelque chose bien longtemps…

« Mais et toi ? Les études et le boulot ça va ? Tu t’en sors ? Tu n’as besoin de rien ? »

Sa voix me coupa dans mes réflexions quant à sa face béate. Il avait repris une expression plus habituelle chez lui et me regardait avec attention. Je poussais un long soupir avant de répondre, il avait le chic pour détourner mes questions autant qu’il le pouvait. Mais il n’échappera pas à mon interrogatoire si facilement… Je m’appuyais sur le dossier de ma chaise et jouais un instant avec le petit parasol en papier qui garnissait mon verre, adoptant un air un peu désinvolte.

« Oh, tu sais, la routine… Pour les cours comme je suis dernière année, c’est principalement de la pratique. J’ai dû rendre deux toiles il y a quelques jours, j’aurai ma critique ce vendredi. A part ça, j’ai donné mes illustrations à l’éditeur ce matin et pas de commande en vue. Rien de bien passionnant de ce côté ! »

Je relevais les yeux vers lui, un sourire aux lèvres. La suite allait moins lui plaire mais après tout, c’était lui qui m’avait demandé si je n’avais besoin de rien ! J’avais justement un petit quelque chose à lui demander… Rien de bien méchant. Avec Peter, on avait prévu d’aller passer un week-end à la campagne dans deux semaines mais aucun de nous deux ne possédait de voiture. Contrairement à mon frère adoré… Je m’avançai à nouveau sur ma chaise, croisant mes bras sur la table.

« J’aurai justement besoin de quelque chose en fait ! dis-je d’un ton innocent. Je sais que t’aime pas trop ça mais… tu voudrais bien me prêter ta voiture ? J’en aurai besoin pour le week-end prochain, je te la rendrais sans aucune égratignure, promis ! S’il-te plait ? Pour ta sœur chérie ? »

Je lui fis une petite moue triste et de grands yeux de chiens battus pour tenter de l’amadouer. S’il n’était pas d’accord on allait être obligé de prendre le bus et cette idée ne nous plaisait pas trop. Douglas était la seule personne susceptible de nous prêter un véhicule alors… j’allais tout faire pour le convaincre ! Même si la dernière fois qu’il m’avait prêté sa voiture ça s’était pas hyper bien passé…

Vu son air suspicieux, il devait avoir compris que j’allais lui demander un truc. Il me connaissait trop bien pour ne pas le remarquer ! Il resta néanmoins silencieux en attendant ma réponse. Il hocha la tête, satisfait de ma première réponse. Il se souciait toujours beaucoup de mes cours et de mon boulot, alors que je lui avais déjà dit maintes fois de ne pas s’inquiéter à ce propos. C’est vrai, je n’avais jamais eu de soucis à l’école et l’art était ma passion, alors je réussissais plutôt bien mes études. Au niveau du boulot, je n’avais pas à me plaindre, j’avais déjà un contrat permanent alors que je n’étais même pas diplômée. Les commandes allaient et venaient, j’arrivai à me faire connaitre dans Toronto à l’aide de mon site internet. Bon, l’art n’était pas la filière la plus stable qui existe, mais je m’en sortais plutôt bien alors il n’avait pas de soucis à se faire.

«Et vous allez où ? »

Je voyais dans ses yeux qu’il n’aimait pas trop l’idée. Et visiblement, il avait deviné que c’était pour partir avec Peter… En même temps je n’allais pas aller toute seule à la campagne. Et puis Doug était payé pour découvrir ce que faisaient les gens, c’était idiot de croire qu’il allait me dire oui sans avoir toutes les informations qu’il voulait. Et si j’étais douée pour soutirer le plus d’information possible des gens que je rencontrais, mon frère l’était encore plus sous ses airs de gentleman. Il cachait bien son jeu en fait !

«Eh bien, on voudrait faire un petit tour près des grands lacs au Sud de Toronto… On camperait sur la montagne, avec vue sur le lac ! C’est à environ six heure de voiture, mais Peter et moi on peut se relayer ! »

L’enthousiasme teintait ma voix. On avait trouvé cette idée hier, en voyant des tentes en promotion au supermarché. Peter m’avait demandé si j’aimais camper et quand je lui avais avoué n’avoir jamais campé de ma vie, il m’avait dit qu’il fallait réparer cette erreur sur le champ ! En cherchant un peu sur le net, on avait trouvé ces lacs et décidé de s’y rendre. En négligeant un petit détail… le moyen de transport. Heureusement, Doug était là et il m’avait justement invitée ce soir ! Si ça ce n’était pas un signe. Mes yeux se perdirent dans le vague alors que j’imaginais la verdure et le bleu éclatant de l’eau…

« Tu sais que j’ai pas quitté Toronto depuis mes treize ans ? C’est l’occasion rêvée tu ne penses pas !? »

J’avais presque des étoiles dans les yeux rien que d’y penser. Depuis longtemps, j’assouvissais mes envies de voyages en regardant des reportages, en lisant des guides de voyages, en cherchant des photos sur le net. L’idée de quitter Toronto, même si je restais au Canada, me remplissait de joie. J’attendais déjà avec impatience ce week-end, pour le passer avec Peter bien sûr, mais surtout pour sortir un peu de cette ville immense dont je connaissais tous les recoins. Je regardais à nouveau mon frère qui affichait encore une fois ce sourire étrange sur les lèvres, mais il secoua légèrement la tête comme pour penser à autre chose et repris son expression paternelle comme si de rien n’était. Décidément, il me cachait vraiment un truc…

 

Il resta impassible alors que je lui expliquais ou je voulais aller, tentant certainement de ne pas craquer trop tôt. Son regard s’assombrit légèrement quand j’évoquais Peter, l’idée qu’il touche à sa voiture n’avait pas l’air de l’enchanter. Quand je pris la parole pour la seconde fois, il me fixa un instant avant de baisser les yeux vers sa boisson en soupirant. Je m’en voulu un peu de le faire culpabiliser de la sorte, et ce n’était d’ailleurs pas mon intention. Il m’avait élevé tout seul pendant des années, subvenant à mes besoins avec son propre salaire et m’avait carrément payé mes études. Je comptais lui rembourser, un jour, même si il ne m’avait jamais rien demandé, mais je n’avais pas assez d’argent pour ça pour le moment. Alors évidemment que je ne pensais pas une seule seconde que c’était à cause de lui que je ne voyageais pas, loin de là. J’avais envie de lui dire tout ça mais je le sentais proche d’accepter alors je me retins quelques secondes encore. Au bout de quelques instants de réflexion, il releva les yeux vers moi.

« Oui, bon…. A une condition, Tu conduis ma voiture, tu fais des pauses régulièrement et tu y fais extrêmement attention. Quitte à ce que vous reveniez lundi. Mais Peter ne conduis pas ma voiture, c’est clair ?! »

Mon visage s’éclaira d’un immense sourire. Je ne pus retenir un petit cri de joie et me levais de ma chaise pour me jeter sur mon frère. Tout en l’enlaçant je me mis à le remercier sans discontinuer, ne prêtant aucune attention aux autres clients qui s’étaient retournés vers nous, intrigué par le bruit. J’allais vraiment voir ces lacs !! Conduire tout le long du voyage ne me dérangeait pas le moins du monde, il suffirait que l’on s’arrête plus longtemps. Si Douglas ne voulait pas que Peter touche à sa voiture, il ne la touchera pas je n’allais pas courir le risque de lui désobéir. Il allait encore me dire que mon frère avait quelque chose contre lui mais c’était la seule condition alors autant la respecter. Et puis il fallait que Peter arrête de s’en faire, Doug n’avait jamais vraiment apprécié aucun de mes copains. Son côté protecteur m’exaspérait parfois un peu mais je ne pouvais pas trop lui en vouloir, j’étais sa petite sœur après tout. Au bout d’un petit moment, posais un gros bisou sur la joue de mon frère et vint me rasseoir à ma place.

« Merci beaucoup Doug, t’es vraiment génial !! Je te promets que je ferai super attention ! Juré ! Et je ne laisserai pas Peter conduire si c’est ce que tu veux. Mais c’est un type bien tu sais, faudrait que tu lui fasses un peu confiance. »

Je lui fis un nouveau sourire, je m’entendais excessivement bien avec Peter et j’étais persuadée que si chacun des deux y mettait un peu du sien, ils s’entendraient bien au aussi. Après tout, ils avaient quelques points communs et il n’y avait aucune raison qu’ils ne s’apprécient pas. Je trouvais ça dommage que ce soit si tendu entre eux… Surtout qu’ils m’étaient tous les deux très chers, et faire en sorte qu’ils se croisent le moins possible commençait à devenir compliqué.

Je repensais soudainement à l’expression étrange que Doug avait affichée un peu plus tôt. Ce genre de sourire n’était pas coutumier chez lui et ça m’intriguait de plus en plus… Tout en attrapant la carte de menu qu’un serveur me tendait, je plongeai mon regard dans celui de mon frère en essayant d’y lire la réponse à mes questions.

« Dis-moi Doug…. Tu ne me cacherais pas un truc là ? Ne va pas croire que je n’ai pas remarqué ton sourire béat de tout à l’heure ! Allez, dis-moi tout ! »


 

Malgré son sourire, Doug ne sembla pas réellement convaincu quand je lui dis qu’il devait faire confiance à Peter. Ils avaient encore du chemin à parcourir à ce niveau là… Peut-être que je devais arrêter de les faire s’éviter et au contraire, organiser un diner ou un truc du genre ? L’idée de passer une soirée dans une ambiance tendue ne me réjouissait pas trop, mais si ça pouvait les faire se connaître un peu, ça m’arrangerait. Il fallait que je réfléchisse à tout ça. Alors que je lui demande ce qu’il me cache, il me fait un petit sourire en coin.

« Moi ? Noooon…. »

J’inclinai la tête sur le côté et pris un air suspicieux, absolument pas convaincue. Sa voix trainante et son intonation enjouée laissèrent entendre le contraire de ce qu’il disait. Alors qu’il faisait mine de se cacher derrière son menu, j’abaissais sa carte avec ma main et le regardait dans les yeux en haussant un sourcil. Je n’étais pas dupe, il le savait bien. Il me sourit encore un instant avant de craquer.

« Boooon. J’ai une petite amie….Elle s’appelle Amelia, et oui c’était ma cliente, mais j’ai craqué, et je me suis mis avec elle une fois que l’affaire était finie. Elle est très jolie, et je l’aime beaucoup. »

J’ouvrais la bouche sous la surprise. Une petite amie ? Alors là je m’attendais à tout sauf à ça ! Je comprenais maintenant d’où venait son air béat, il était amoureux ! Eh bien, ça c’était nouveau. Il était tellement pris par son boulot qu’il n’avait pas l’air de penser beaucoup à ça habituellement. Voyant mon air ébahi, Doug ria doucement avant de reprendre la parole tout en reprenant son menu de mes mains.

« Ne soit pas si surprise, c’est toi qui ne cesse de me dire de me trouver quelqu’un, et bien c’est fait, maintenant remet toi ! »

Je fermai la bouche pour laisser place à un grand sourire. J’étais vraiment content pour lui, et si j’avais été étonnée de la sorte c’était simplement parce qu’il ne m’avait jamais vraiment annoncé un truc pareil du coup je ne m’y attendais pas. Il avait déjà anticipé une partie de mes questions et répondu sans attendre que je les poses, comme son prénom, ou comment ils s’étaient rencontrés. Mais il m’en restait encore quelques-unes en tête, comme toujours !

« Excuse moi, c'est juste que je m'y attendais pas ! C’est vraiment trop bien Doug ! Je suis super contente pour toi ! Ça fait combien de temps ? Elle est comment ? Gentille ? Drôle ? Tu me la présenteras bientôt j’espère ? »

J’avais déjà hâte de rencontrer la fille qui était capable de faire sourire mon frère de la sorte. J’étais persuadée qu’elle devait être géniale, pour que mon frère tombe amoureux ! Ce qu’il avait dit plus tôt me traversa à nouveau l’esprit. C’était l’une de ses anciennes clientes ? Une de celles qu’il avait citées plus tôt ?

« C’est laquelle, celle qui avait perdu son copain depuis trois ans ou celle qui s’est fait agresser ? Ou une autre peut-être ? »

Ça ne changeait pas grand-chose, mais j’avais simplement envie de savoir, comme d’habitude. J’aimais avoir tous les détails d’une histoire !

 

Mon frère semblait ravi de son petit effet, je devais avouer qu’il n’arrivait pas souvent qu’une déclaration me cloue le bec de la sorte. Habituellement, même l’annonce la plus folle, ou la plus insensée me transformait en moulin à parole incontrôlable. Mais ma réaction avait simplement été légèrement retardée, parce que des questions j’en avais ! J’en posai d’abord quelques-unes, les premières me traversant l’esprit. Doug les écouta patiemment, visiblement il n’espérait pas trop m’avoir rendue muette avec sa déclaration et une fois encore cela prouvait qu’il me connaissait mieux que personne. Celui qui arriverait à me faire taire n’était pas encore né !

« Ca fait quelques semaines, oui elle est gentille et elle a de l’humour. Elle est belle, grande et rousse, avec un sourire magnifique. Et c’est celle qui se faisait harceler. »

Quelques semaines ! Mais pourquoi ne m’avait-il pas prévenue plus tôt ? Quand j’avais rencontré Peter dans ce parc, je lui avais téléphoné le soir même, alors que nous n’avions même pas encore eu de rendez-vous ! J’avais simplement envie de partager avec mon frère cette rencontre qui m’avait semblée si particulière. Je ne savais même pas si ça allait déboucher sur quelque chose à ce moment. Mais sur ce point, mon frère et moi étions vraiment différent. Il voulait certainement être certain de ses sentiments avant de m’en parler, je pouvais comprendre ça. Et donc c’était la fille qui se faisait harceler. J’ouvrai à peine la bouche pour poser plus de questions que Douglas repris la parole, me coupant au passage.

« Donc ça serai bien que tu oublies ça, quand tu la verras. Pas un mot sur ce sujet sauf si elle t’en parle. Elle est assez secrète, alors évite aussi d’être trop toi, et de lui poser milles questions en une seconde. Tu pourras être toi un peu plus tard, d’accord ? »

Je fermai immédiatement la bouche, déçue. Pas de questions ? Ca risquait d’être difficile. J’adorais poser des questions ! Mais bon, je devais pouvoir faire ça pour mon frère. Et puis, quand elle me connaitrait, elle voudrait certainement tout me raconter ! Il suffisait d’attendre un peu… Je fis une petite moue boudeuse pour bien faire comprendre à Doug que ça ne me plaisait pas trop alors qu’une serveuse s’approchait. Je n’avais pas encore pris le temps de feuilleter la carte et j’hésitais longtemps sur ce que j’allais manger avant de finalement porter mon choix sur le plat du jour et la serveuse repartit en cuisine avec notre commande.

« D’accord, concédais-je. J’essaierai de ne pas être indiscrète. Mais toi, tu peux déjà me raconter une partie de l’histoire, non ? Pour ne pas que je mette les pieds dans le plat en parlant d’un truc qu’il ne faut pas ? »

C’était surtout pour assouvir ma curiosité que je lui demandais ça, mais mon argument était valable. S’il ne voulait pas que j’aborde un sujet délicat sans le savoir, il allait bien devoir me faire ne serait-ce qu’un petit résumé de son histoire.

Alors que je lui souriais toujours un air angélique, il me fixa un instant tentant certainement de me faire changer d'avis avant de céder en soupirant. Il ne devait pas avoir espéré très longtemps, il avait l'habitude avec moi. Et il savait que si il ne répondait pas maintenant, je le poursuivrait avec cette histoire jusqu'à ce qu'il me donne assez d'éléments à mon goût. Il se pencha légèrement en avant pour m'expliquer plus en détail sa rencontre avec cette Amélia.

« Et bien… elle m’a appelé pour que je découvre si elle ne devenait pas folle. Elle se sentait suivie. J’ai fais mon job, puis j’ai découvert ce qui se passait et avec l’aide d’un ami de la police on l’a coffré. Par la suite, on s’est revus, on a discuté, et je l’ai embrassée… Et voilà, les grandes lignes. »  

Quand il s'arrêta de parler, je restais d'abord silencieuse quelques instants, le fixant en espérant une éventuelle suite mais je vis tout de suite dans son regard qu'il ne lâcherait rien de plus. J'allais devoir me satisfaire de ça pour le moment. J'arrêtais donc de dévisager mon frère avec instance et repris une expression plus classique, toujours un grand sourire aux lèvres.

Alors comme ça, il avait en quelque sorte sauvé cette fille ? Pas étonnant qu'elle soit folle de lui ! Enfin, je ne savais pas vraiment ce qu'elle pouvait ressentir, après tout je ne l'avais jamais rencontrée, mais j'imaginais bien la scène dans mon esprit. C'était digne du meilleur James Bond, avec Doug dans le rôle principal, qui venait au secours d'une fille aux cheveux roux flamboyant. Ça c'était une rencontre explosive !

« J'espère bien que ce type va croupir en prison pour longtemps ! Enfin de toute façon tu sera toujours la pour sauver cette fille maintenant ! »

Je lui fis à nouveau un grand sourire, et repensais soudain à l'autre fille, celle qui avait cherché son copain pendant trois ans... Cette histoire me paraissait utopique et donc forcément passionnante ! S'il ne voulait pas me raconter en détails l'histoire d'Amelia, il pouvait certainement m'expliquer ce qui avait séparé cette fille de son copain.

« Et l'autre alors, celle qui cherchait son petit ami. Tu lui as retrouvé ? Ils sont réunis maintenant ? »

Il sembla plutôt d’accord avec moi quand je parlais de laisser ce type en prison et je savais que de toute façon, s’il sortait il serait bien surveillé par mon frère. Jamais il ne laisserait ce malade s’approcher encore de sa copine, c’était certain. Que ce soit celui-là ou un autre d’ailleurs. Il sembla un peu soulagé que je ne pose pas plus de question sur cette Amélia et que je change de sujet en parlant de l’autre fille et de son copain. Voyant qu’il allait me parler, je posais ma tête sur mes bras eux-même posés sur la table et attendit la suite, impatiente d’entendre cette histoire.

« Eh bien, en fait, après un accident plus qu’horrible, où toute la famille du mec est mort, il s’est… comment dire, enfuie de son pays. Il a voyagé dans presque tous les pays. Et pendant ce temps-là, Mackenzie l’a recherché partout. Trois ans ! Parce qu’en fait David pensais qu’elle était morte aussi. Ce qui est loin d’être le cas. Bref, elle a fait appel à moi pour le retrouver ici à Toronto. »

Il marqua une petite pause et j’en profitai pour enregistrer tout ça. C’était vraiment triste ! Ce type avait donc perdu toute sa famille dans un accident… je ne pus m’empêcher de penser à mes propres parents, l’espace de quelques secondes. J’essayai toujours de mettre ça de côté dans mon esprit, parce que ça me rendait triste et que je détestais être triste. D’abord parce que, évidemment, ça n’avait rien d’agréable, mais aussi parce que le fait d’être maussade faisait déprimer les gens autour de moi. Alors qu’un sourire faisait tellement plaisir ! Pourquoi passer son temps à réfléchir à des trucs déprimants alors qu’il y a tellement de raisons de sourire dans la vie ? Et puis, quand je croisais des gens dans la rue, des inconnus, et qu’ils me rendaient mon sourire, ça me faisait vraiment plaisir. J’avais l’impression que rien que le fait d’être de bonne humeur aidait les autres. Ce David donc, n’avait pas supporté ce drame et c’était enfui alors, en pensant que sa copine était morte elle aussi… C’était un peu idiot. Il aurait dû s’en assurer, je ne sais pas moi, rester pour l’enterrement ? Il ne regarde jamais de film ou quoi ? Les vraies histoires d’amour ça finit toujours bien, non ? Enfin, c’est vrai qu’après avoir perdu tous ceux qu’il aimait, il ne devait pas être capable de réfléchir correctement. Et puis cette pauvre fille qui avait dû le rechercher partout dans le monde. Pendant trois ans ! C’était vraiment incroyable comme histoire. Ils pourraient facilement passer dans une de ces émissions ou l’on raconte le destin incroyable de certaines personnes.

« Et je l’ai retrouvé son homme. Ce n’était pas bien compliqué, elle avait fait presque toutes les démarches, je n’avais plus qu’à faire mon travail et mettre mes relations en jeux. En moins d’une semaine j’avais récupéré son adresse, et je l’ai donné à Mac pour qu’elle puisse le retrouver. Aujourd’hui ils doivent filer le parfait amour est c’est très bien ! »

Je relevai la tête de mes coudes, admirative. Leur histoire était tellement magnifique ! Ils auraient de quoi raconter à leurs enfants et petits-enfants, ça c’est sûr ! Et tout ça, c’était grâce à mon frère, qui les avait réunis. Il était vraiment génial. Il ne lui manquait que le slip rouge et les collants et je pourrai l’appeler Superman ! Ça lui irait bien comme costume en plus ! Je gloussais légèrement à cette pensée et me redressais en chassant mes cheveux sur l’arrière d’un coup de main.

« C’est vraiment troooooooop beau comme histoire ! Tu crois que je pourrai la rencontrer aussi, dis ? J’aimerai trop entendre son histoire ! »

Je lui fis un grand sourire puis enchainais presque immédiatement sans faire attention à son air un peu décontenancé. Beh quoi ? Pourquoi je pourrai pas la rencontrer ?

« Enfin, en tout cas t’es vraiment génial de les avoir fait se retrouver comme ça ! Je suis sûr qu’ils doivent te bénir tous les jours, t’imagines ? Si ça tombe ils ont érigé un autel en ton honneur dans leur appart ! »

Je riais à nouveau et m’écartais de la table quand un serveur s’approcha avec nos plats. Une fois qu’il les eu déposés devant nous, je lançais un rapide « bon appétit » à mon frère et attaquai mon assiète, affamée.

Ma réaction l’avait surpris apparemment, et il ne semblait pas décider à me présenter à cette fille. Mais bon, je pouvais comprendre, il n’était pas sensé parler de ses affaires avec sa petite sœur, la discrétion était importante dans son métier. C’est d’ailleurs pour cette raison que je n’aurais jamais pu faire ce genre de boulot, j’étais bien trop bavarde pour ça ! Il m’observa d’abord manger un instant, l’air amusé, puis me souhaita à son tour bon appétit et attaqua son assiette. Il s’en suit un petit silence, en même temps il n’était pas facile de parler la bouche pleine, le seul moment pendant lequel je ne pouvais pas parler, c’était bien quand je mangeais.

« Non, je ne pense pas qu’il est fait un hôtel dans le placard, et je ne voudrais pas. Je n’ai fait que mon travail, et puis elle avait fait presque tout le travail déjà, je n’avais plus grand-chose à faire pour le retrouver pour de bon. »

Je relevais les yeux et fit une petite moue. Pourquoi est-ce qu’il minimisait toujours tout ce qu’il faisait ? Je ne pensais pas non plus qu’il devrait s’en vanter, loin de là, mais quand on faisait quelque chose de bien il fallait savoir le reconnaitre… Surtout qu’il avait beaucoup de mérite, et qu’il ne semblait pas le remarquer ! Depuis qu’il avait changé de boulot, il ne semblait jamais vraiment fier de lui, cet incident durant lequel il avait tiré sur ce type… ça avait brisé toute son estime de soi. Et si il semblait plutôt bien remis, je savais que c’était encore difficile pour lui de se considérer comme quelqu’un de bien.

« Et toi sinon, a part vouloir ma voiture, tu vas bien ? Vraiment, tout roule ?
- Disons que quand j’aurai ma propre voiture ça roulera mieux, le charriais-je. Mais sinon, oui, tout va bien je t’assure ! »

Je riais légèrement en entendant l’expression qu’il avait utilisée. Puis, en pensant un peu à ma vie, je me confortais dans l’idée que tout allait bien. Je n’avais vraiment aucune raison de me plaindre ! Enfin, sauf peut-être quand je pensais à mes parents… Mon sourire faiblit légèrement en pensant à tout ça, même si je préférais être joyeuse en toute circonstance, il m’arrivait de déprimer un peu en me remémorant le visage de mes parents. Je n’en parlais jamais, parce que ça faisait remonter toutes sortes de souvenirs à la surface et que je n’aimais pas aborder des sujets aussi déprimants, mais mon frère était certainement la seule personne avec qui je pouvais en discuter.

« Tu sais… Ils me manquent souvent. »

J’avais presque murmuré ces mots qui ne me ressemblaient pas, et je baissais les yeux vers mon assiette en donnant un petit coup de fourchette dans ma ratatouille. Soudainement, je n’avais plus très faim…

Ma soudaine baisse de moral ne me ressemblais pas du tout. Habituellement, j’affichais une bonne humeur constante, et ce n’était pas une façade pour cacher mes sentiments ou autre chose de ce genre, j’étais réellement heureuse. Je ne demandais pas grand chose après tout, j’avais presque terminé mes études, déjà un job plutôt bien rémunéré et qui me permettait une certaine indépendance, un petit-ami que j’aimais beaucoup, des amis sur qui compter et puis mon frère qui, je le savais, serait toujours là pour moi. J’avais tout ce que je pouvais souhaiter et c’était très bien comme ça, j’arrivais à déjouer le train-train quotidien en essayant de trouver des occupations diverses et tout se passait bien. De fait, je n’avais aucune raison d’être de mauvaise humeur, et je préférais prendre les problèmes avec le sourire et en relativisant toujours autant que je le pouvais. De toute façon, s’énerver n’arrangerait rien, alors autant ne pas laisser les soucis quotidiens ébranler ma bonne humeur ! Et puis, pour moi, cet état d’esprit était contagieux, tout comme la mauvaise humeur. Si l’on reste avec quelqu’un qui à le moral dans les chaussettes, il arrive fréquemment que le notre baisse aussi et inversement. Du coup, je préférais envoyer des ondes positives à tout le monde ! Généralement, ça fonctionnait plutôt bien.

Mais pourtant, Doug était un peu la seule personne avec qui je me permettais d’être triste, ou nostalgique. D’abord parce que je savais qu’il comprenait, mais aussi parce que j’avais parfois besoin de parler de tout ça, et que je ne voulais déprimer personne avec mes états d’âme. Evidemment, je ne souhaitais pas non plus ennuyer mon frère, mais il avait toujours été là pour moi et, malgré moi, je continuai parfois à le considérer comme une sorte de héros qui savait toujours quoi faire. Un court silence suivi ma déclaration alors que je sentais le regard attentif de Douglas sur moi. Les yeux fixant toujours mon assiette, je l’entendis soupirer qu’ils lui manquaient aussi et boire un peu d’eau. Alors qu’il déposait son verre sur la table, il me releva le menton doucement pour que je le regarde et il me sourit en continuant.

« Ils seraient fiers de toi petite soeur. Une fille si pétillante voyant toujours la beauté du monde. Et qui plus ai, est très intelligente, belle, comme sa mère. »

Cette phrase me rendit le sourire instantanément, même s’il n’était peut-être pas aussi intense que mon sourire habituel. Douglas savait toujours quoi dire pour me remonter le moral. Je m’en voulais un peu de lui attribuer cette tâche, il m’avait déjà pratiquement élevée, il n’avait plus besoin de devoir me rassurer ou même s’occuper de moi maintenant que j’avais vingt-quatre ans ! Il fallait que je commence vraiment à me gérer seule. Evidemment, je le faisais déjà pour beaucoup, mais il suffisait que j’aie un problème pour que j’appelle Doug à la rescousse. Je devais perdre cette mauvaise habitude ! Il devait avoir des problèmes parfois, lui aussi, non ? En réalité, il restait assez discret sur son sujet, comme si il ne voulait pas m’embêter avec ses soucis. Mais, par la même occasion, il me faisait me sentir encore plus coupable quand je lui parlais des miens. Et je voulais être la pour lui, moi aussi ! J’étais assez grande pour l’aider maintenant.

« Tout comme ils seraient fiers de toi ! Tu sauves le monde maintenant ! »

Je lui fis un petit clin d’oeil. J’exagérais peut-être mais comme il avait la fâcheuse tendance de minimiser tout ce qu’il faisait, ça me semblait tendre vers la réalité. Il ne sauvait pas vraiment le monde à proprement parler, mais il sauvait des gens, il en réunissait d’autre. Il aidait les autres, en gros, et je trouvais ça tellement cool que j’en faisais une hyperbole. Je repensais à cette Amélia, et à son regard quand il avait parlé d’elle... il avait l’air vraiment amoureux. Et il le méritait ! J’étais certain qu’elle le méritait aussi, Doug ne pouvait pas tomber amoureux de quelqu’un de mal.

« Et toi, tu ne comptes pas prendre des vacances un de ces jours ? Tu sais bien que tu travailles trop ! »

Maintenant qu’il avait une petite-amie, peut-être qu’il ralentirait un peu le rythme au niveau boulot pour pouvoir passer plus de temps avec elle. Je ne savais pas vraiment quand était la dernière fois qu’il avait pris des congés mais il me semblait que ça remontais à bien loin ! Et même si je trouvais son boulot génial, je me doutais qu’il devait parfois être éprouvant.
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Doug embla étonné à l’idée de prendre des vacances. Ben quoi ? Il avait bien droit à un peu de repos lui aussi, non ? Il prenait toujours soin des autres mais il s’oubliait un peu trop souvent à mon goût, heureusement que j’étais là pour lui rappeler qu’il existait !

« Oh un jour peut-être…. Je me ferrai peut-être un petit week end un de ces jours avec Amelia si elle le veut bien, si elle n’est pas trop occupée non plus. »

Le ton qu’il avait utilisé était plutôt vague, il ne devait pas vraiment y avoir pensé en fait. Je lui fit une petite moue réprobatrice, il avait intérêt à en programmer dans pas longtemps sinon il allait m’entendre ! Le repas repris où il en était alors que nous continuions de discuter de sujets divers et variés. Enfin, discuter était un bien grand mot en réalité c’était plutôt moi qui parlait et lui qui écoutait. C’était souvent comme ça que ça se passait, il me posait quelques questions et je commençais à lui raconter la moindre chose qui avait pu se passer dans ma vie, et le tout avec des détails s’il vous plait ! Parfois j’aimerais qu’il fasse de même de son côté, qu’il m’explique de petites choses insignifiantes de son quotidien, mais ça lui arrivait très rarement. Plus jeune, il m’arrivait de penser qu’il me considérait trop jeune, ou trop idiote peut-être pour le comprendre et que c’était pour cette raison qu’il ne me parlait pas souvent de lui. Mais avec le temps j’ai fini par comprendre qu’il était juste bien plus réservé que moi, qui avais tendance à un peu trop m’ouvrir aux autres.

Le temps passa plutôt rapidement et je n’étais pas encore à court d’histoires à raconter quand le dessert arriva. J’avais pris une glace comme souvent et je me mis à la dévorer tout en continuant de parler, ce qui fit rire doucement mon frère. Une fois ma crème glacée terminée et après avoir terminé mon histoire, je jetais un coup d’œil à la grosse horloge qui était suspendue au mur du fond. Quoi, déjà cette heure-là ? Mais le temps passait trop vite quand j’étais avec mon frère !

« Bon, il est tard et je suis sûre que tu commences à en avoir marre de mes histoires ! fis-je en me levant. Je ferais mieux d’y aller, j’ai promis à Peter que je ne rentrerais pas trop tard. »

Je lui fis un grand sourire tout en enfilant mon écharpe et mon bonnet. Il n’aimait peut-être pas que je parle de Peter, mais il restait mon petit-ami et il était normal que je passe du temps avec lui, non ? Une fois emmitouflée dans mon manteau, je fis le tour de la table pour déposer un gros bisous sur la joue de Douglas tout en lui lançant d’un ton enjoué :

« Tu m’invites bien sur ? Et n’oublie pas, je veux rencontrer ta copine ! Elle ne s’en sortira pas comme ça ! »

Je lui lançais un dernier clin d’œil avant de partir en répondant à son signe de main et montais dans le premier taxi qui passait par là pour rentrer chez moi. Peter devait m’attendre depuis au moins une heure, mais comme tout le monde dans mon entourage, il savait que la ponctualité n’était pas vraiment ma principale qualité… heureusement que j’avais un beau sourire pour excuser tout ça !